LE BIENHEUREUX FRANÇOIS DE LAVAL (1623-1708): LE PÈRE DE L'ÉGLISE DU CANADA

Notice sur la vie et la spiritualité du bienheureux François de Laval pour le Supplément à la liturgie des Heures le jour de sa fête liturgique, le 6 mai



Sa vie


François de Laval naît à Montigny-sur-Avre dans le diocèse de Chartres en France, le 30 avril 1623. Après avoir fait ses lettres et sa philosophie au Collège de La Flèche dirigé par les Jésuites, il entreprend sa théologie au collège de Clermont à Paris en 1641. Destiné à l'état ecclésiastique, il doit toutefois, à la suite de la mort de ses deux frères plus vieux, prendre la responsabilité de la famille. Il peut continuer quand même son cheminement vers le sacerdoce qu'il reçoit en 1647. Il renonce plus tard à ses droits sur la seigneurie familiale, puis il séjourne à Caen en Normandie, de 1654 à 1658 auprès d'un maître spirituel laïc, Monsieur de Bernières, dont le neveu accompagnera Mgr de Laval à Québec en 1659. Choisi comme vicaire apostolique au Tonkin en Asie, François de Laval voit son affectation changée pour la Nouvelle-France. Il est sacré évêque à Paris dans la chapelle de la Vierge - aujourd'hui disparue - de l'abbaye Saint-Germain-des-Prés le 8 décembre 1658, à l'âge de 35 ans. Il arrive à Québec le 16 juin 1659. Le territoire du vicariat apostolique est érigé en évêché en 1674. Il en devient le premier évêque, puis après 11 ans à la tête du nouveau diocèse, il démissionne en 1685 et passe la main à son successeur Mgr de Saint-Vallier. Il obtiendra du roi Louis XIV la permission de revenir se retirer à Québec « pour y achever de finir mes jours, écrit-il, en repos et avoir la consolation de mourir dans le sein de mon Église ». Tout en se consacrant à la prière, il aidera le nouvel évêque et le remplacera lors de ses absences en France. Il meurt le 6 mai 1708, à l’âge de 85 ans, des suites d’une engelure au talon survenue lors de la cérémonie du Vendredi saint. Il a été proclamé bienheureux par le pape Jean-Paul II le 22 juin 1980.

Son oeuvre pastorale, de 1659 à sa démission comme évêque de Québec en 1685, est marquée par quatre voyages en France, par la lutte contre les méthodes de commerce des peaux de castors consistant à donner de l'alcool aux Amérindiens comme monnaie d'échange, par de nombreuses fondations dont la plus importante est le Séminaire des Missions Étrangères de Québec (SME), connu maintenant sous le nom de Séminaire de Québec, qu’il unit à celui de Paris dont il avait été un des fondateurs. Son Séminaire est destiné à être au cœur de la vie et de l'organisation de l'Église du Canada : lieu de formation des futurs prêtres, société de prêtres diocésains qui vivent en commun, futur chapitre diocésain, centre de direction des paroisses dont les curés sont nommés par l'Évêque et les directeurs du Séminaire. Il fonde aussi la confrérie de la Sainte-Famille érigée le 14 mars 1665, un petit séminaire en 1668, suivi d’une école d’arts et métiers à St-Joachim et de nombreuses paroisses, mais sans contredit, ce sont ses visites pastorales qui sont au cœur de son action pastorale. Dans ces régions où la faible densité de la population dispersée sur un immense territoire rend l'entreprise des plus ardues - environ 2 000 habitants en 1659, partagés entre trois centres de peuplement : Québec, Trois-Rivières et Montréal, sur une distance d'environ 250 kilomètres -, il se lance « sur les neiges dès son premier hiver pour visiter ses ouailles, non pas à cheval ou en carrosse, mais en raquettes et sur les glaces ». Il voyage « mené dans un petit canot d'écorce par deux paysans » nous racontent les Relations des Jésuites. Il s'arrête pour les confirmations, même là où il n'y a que trois ou quatre familles.

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Sa spiritualité

Le point de départ de la spiritualité de François de Laval réside dans un détachement prononcé qui allait bien avec son tempérament. Il s’en était imprégné auprès de Monsieur de Bernières dans ses années de séjour à Caen. Ce détachement est « un grand système de désappropriation » qui se ramène à la maxime spirituelle suivante : « Nous n'avons pas de meilleur ami que Jésus-Christ. Suivons tous ses conseils, surtout ceux de l'humiliation et de la désappropriation du cœur » comme écrit son premier biographe, Bertrand de La Tour.

Pour François de Laval, la désappropriation n’est autre chose que l’évangile vécu dans toute sa radicalité. Il conserve à cette désappropriation son sens moral de renoncement bien entendu. Ainsi, la désappropriation inclut les valeurs de détachement, de pauvreté, d'humilité puisqu'elle reste toujours une certaine privation, mais l'essentiel de la désappropriation pour François réside d'abord dans le partage et la mise en commun des biens. C’est pourquoi la désappropriation devient partage matériel, puis dans un même mouvement, partage fraternel. Il voulait, écrit Bertrand de La Tour, « que tout le clergé ne fît qu'une grande famille », et c'est dans ce but qu'il demandait qu'on ne se départît jamais « de la désappropriation qui laisse tout en commun entre les mains du supérieur ».

La désappropriation se refermerait sur elle-même si, en fin de compte, elle ne rendait de plus en plus libre et accueillant à l’action de Dieu. À mesure que François de Laval avance en âge, les fruits d'une ouverture amoureuse à la volonté de Dieu à travers les événements se manifestent dans une constance, une patience et un abandon qui grandissent. C'est cette expérience de foi confiante que François de Laval a vécue tout au long de sa vie. Elle est l'aboutissement de la désappropriation et elle est au cœur de son expérience spirituelle. « Il y a longtemps que Dieu me fait la grâce de regarder tout ce qui m'arrive en cette vie comme un effet de sa Providence », écrit-il en 1687. Dans les principaux événements de sa vie, François de Laval recherche promptement leur signification spirituelle soit pour son œuvre pastorale, soit dans son itinéraire spirituel personnel. Cette « expérience de Providence », si l'on peut dire, ne serait pas complète si elle ne suscitait une réponse. Cette réponse est l'abandon : « Il est bien juste... que nous ne vivions que de la vie du pur abandon en tout ce qui nous regarde au-dedans comme au-dehors », dira-t-il après le refus du Roi de le laisser partir pour le Canada en 1687. À son ami Henri-Marie Boudon, en 1677, il disait déjà : « Tout ce que la main de Dieu fait nous sert admirablement, quoique nous n'en voyions pas sitôt les effets ».

François de Laval donne l’exemple d'un pasteur totalement consacré à sa tâche dans une fidélité quotidienne et durable. À sa mort en 1708, il laissait la réputation d'« un pasteur plein de l'esprit des apôtres ». Face aux défis de l’évangélisation, sa persévérance et sa confiance totale au Seigneur peuvent être une inspiration et un exemple stimulant.


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Dernière mise à jour 15 mai 2008