Séminaire de Québec
Société de prêtres diocésains fondée en 1663 par le Bienheureux François de Laval, premier évêque de Québec
  • Homélie pour la célébration de la fête de l'Immaculée Conception en l'année du 150e anniversaire de la proclamation du dogme de l'Immaculée et pour le renouvellement du "voeu de l'Immaculée" des prêtres du Séminaire fait depuis 1665

    au Séminaire de Québec le 8 décembre 2004

    Textes de l'Écriture: Gen 3, 9-15,20 Eph 3,-6, 11-12 Lc 1, 28-42

    « Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi » 
    Chers confrères, chers amis/es,

    Le bienheureux François de Laval, notre fondateur, avait une dévotion toute spéciale à Marie et en particulier à l’Immaculée Conception. J’ai eu l’occasion de parcourir ses écrits à la recherche des traces de cette dévotion et j’ai été frappé par le fait que la dévotion à Marie de François de Laval se démarquait de la simple piété mariale. En effet, le regard qu’il porte vers Marie et sa prière à Marie l'amènent à entrer plus profondément dans le mouvement de l’histoire du salut en action. Et c’est sur ce terrain que se situe le mystère de l’Immaculée Conception.

    Le mystère de l’Immaculée Conception

    En effet, si Marie est sans tache (c’est ce que veut dire le mot immaculée qui vient du latin « macula » qui veut dire tache et « in » privatif) c’est qu’elle a été préservée de la tache originelle. « Comblée-de-grâce » comme l’appelle l’Ange dans le récit de l’Annonciation que nous venons de lire, elle en est si remplie qu’en elle s’épanouit toute la richesse du salut. Il prend forme en elle à un point tel qu’elle en est totalement imprégnée dans son corps et dans son âme.

    Pour exprimer cette richesse du salut à l’œuvre en Marie que le mystère de l’Immaculée Conception nous permet de découvrir, le pape Jean-Paul II, lors de son voyage à Lourdes le 14 août 2004 pour le 150e anniversaire de l’apparition de la Vierge à Bernadette, a eu la formule suivante que je voudrais commenter brièvement : « La conception immaculée de Marie, dit Jean-Paul II, est le signe de l’amour gratuit du Père, l’expression parfaite de la rédemption accomplie par le Fils, le point de départ d’une vie totalement disponible à l’action de l’Esprit » (Documentation Catholique, n. 2320, p. 705).

    «Signe de l’amour gratuit du Père»

    Le Groupe de Dombes consacré au rapprochement entre catholiques et protestants écrit dans son document Marie dans le dessein de Dieu et la communion des saints (Paris, Bayard- Centurion, 1999, 196p. n. 272) : « Dans la mesure où les catholiques admettent que le fiat de Marie lors de l’Annonciation n’était possible que moyennant la grâce de Dieu, ils peuvent justement présenter l’Immaculée Conception comme une expression radicale de cette grâce ». Comment ne pas reconnaître la portée extraordinaire de la salutation de l’Ange « Je te salue » ou selon d’autres traductions « Réjouis-toi, Comblée-de-grâce », une salutation unique dans la Bible où Marie est présentée comme remplie de cet amour gratuit du Père pour l’humanité. Le mystère de l’Immaculée Conception loin de nous arrêter à Marie, nous tourne, vous le voyez, directement vers le Père d’où viennent toute grâce et toute bénédiction comme le souligne avec force le texte de la deuxième lecture si bien choisie où saint Paul rappelle avec souffle le dessein de salut du Père pour l’humanité.

    « Expression parfaite de la rédemption accomplie par le Fils »

    Ce dessein de salut est un « don gratuit qu’il nous fait en son Fils bien-aimé ». C’est pourquoi, celui-ci se livre tout entier à la volonté du Père. Fils bien-aimé, il ouvre la porte de l’intimité filiale à tous ceux et celles qui accueillent ce don gratuit de l’amour du Père. Marie est la première sauvée par le Fils bien-aimé et son « fiat » exprime ce que son être vit. « Comblée-de-grâce », elle a librement accueilli ce don. Comme dit saint Irénée : « en obéissant, Marie devint cause de salut pour elle-même et pour tout le genre humain » (Contre les Hérésies, III, 22, 4). On s’est plu dans cette ligne à opposer chez les Pères de l’Église l’obéissance de Marie et la désobéissance d’Ève dont fait état la première lecture.

    On comprend l’exclamation de Jean-Paul II : « expression parfaite de la rédemption accomplie par le Fils ». On trouve, en effet, dans l’Immaculée Conception l’enracinement foncier du « oui » de la jeune fille visitée par l’Ange, de ce « oui » qui la rend theotokos, Mère de Dieu, dira le concile d’Éphèse en 431.

    « Point de départ d’une vie totalement disponible à l’action de l’Esprit »

    Mais, il en est du « oui » de Marie comme de tous les « oui ». Ils sont confrontés à la durée, à la vie. Ils peuvent se traduire par des allées et des venues où ils sont « galvaudés » parfois, si vous me permettez l’expression, alors que celui de Marie est tout entier baigné par l’Esprit qui repose sur elle.

    « Comment cela se fera-t-il? » demande-t-elle à l’Ange. L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ».

    « Point de départ d’une vie totalement disponible à l’action de l’Esprit », le « oui » de Marie s’étale de jour en jour par une foi totale en l’action de Dieu. Devant Jésus au Temple, à Cana, au pied de la Croix, c’est toujours ce « oui » total qui s’enfouit dans la bienveillance et l’amour du Père qui l’ont marquée depuis sa conception.

    Conclusion

    Comment alors les chrétiens ne l’auraient-ils pas reconnue comme leur modèle? On peut penser que c’est ce qu’avait saisi le bienheureux François de Laval, lorsqu’il faisait avec les prêtres du Séminaire le Vœu de l’Immaculée en vue « de la conservation de ce pays et de la conversion de ceux qui l’habitent ». En effet, Marie, par ce qu’elle est, nous aide à entrer, nous aussi, dans le mouvement du Dessein de salut du Père pour l’humanité, Bonne Nouvelle que nous avons à vivre et à proclamer encore aujourd’hui.

    Que cette Eucharistie, prémices du banquet céleste où tous sont appelés, soit pour nous l’occasion de garder nos cœurs ouverts et accueillants à l’amour gratuit de Dieu et que le vœu que nous referons dans un instant nous permettent de porter dans notre prière tous ceux et celles qui attendent d’être rejoints dans leur vie par les signes et les marques de l’amour gratuit du Père, comme l’a été Marie dont nous célébrons avec joie l’Immaculée Conception. Amen!



    Hermann Giguère, prêtre
    Supérieur général du Séminaire de Québec
    le 8 décembre 2004


    HG/mdb


  • Dernière mise à jour 13 décembre 2004



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