24 février 2004

Le vélo chinois
perd les pédales

Michel de Granndi

C'était dans les années 1970. A la sortie des bureaux, des marées de vélos déferlaient dans les rues. Chacun avait le sien, le même, noir forcément, qu'il aurait pu reconnaître entre mille. Au moment où les grandes capitales occidentales redécouvrent les vertus de la petite reine, la Chine connaît un mouvement exactement inverse. A un rythme accéléré. De 182 vélos pour 100 familles en 1998, le ratio est tombé à 142 l'an dernier, selon les chiffres de l'Association chinoise des bicyclettes. Et même si le parc compte encore 470 millions d'engins, soit le tiers du total mondial, le véhicule à deux roues est clairement passé de mode. Pour des raisons qui ne tiennent pas uniquement à la montée en puissance de la voiture. Laquelle n'est évidemment pas totalement étrangère à cette régression. Plus largement, c'est l'évolution tout entière de la société qui fait perdre les pédales au vélo.

A Pékin, un résident sur quatre utilise encore ce moyen de locomotion pour aller au travail, alors qu'ils étaient 60 % dix ans plus tôt. La faute en incombe essentiellement à l'éloignement du domicile du lieu de travail. En accédant à la propriété, beaucoup de Chinois partent habiter en banlieue, voire en grande banlieue, alors qu'auparavant ils étaient logés par leur unité de travail, donc forcément à proximité de l'usine ou de l'atelier. Pour beaucoup, le trajet domicile-lieu de travail serait trop fastidieux à vélo et prendrait au moins une heure. S'ajoutent à cela de nouvelles considérations d'ordre esthétique ou vestimentaire. Le désir d'être élégant, propre, maquillé aussi est peu compatible avec un trajet à bicyclette dans un pays poussiéreux gagné par la chaleur dès le mois d'avril. Du coup, selon une étude de Datasea Research, 45 % des Pékinois utilisent les transports en commun, 13 % les véhicules privés, 8 % se déplacent à pied, 6 % en taxi et 3 % en vélo électrique.

Jadis considéré comme l'un des trois produits de luxe à posséder absolument avec la montre et la machine à coudre, le vélo est aujourd'hui un produit d'une grande banalité. Sur les 400 marques que compte encore Pékin, les grands classiques que sont « Flying Pigeon », « Pheonix » ou « Forever » ont encore pignon sur rue. Mais leurs produits, d'une qualité aléatoire, ne font plus rêver les Chinois. Seuls les étrangers se laissent tenter par leur look délicieusement rétro et s'achètent en même temps la meilleure des garanties contre les voleurs. Jadis inexistants, ils sont de plus en plus nombreux à faire main basse sur les deux-roues. Avec une préférence affirmée pour « Giant », la marque taïwanaise largement plébiscitée par les jeunes.


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Guy Maguire, webmestre, SVPsports@sympatico.ca
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