MADRID (AFP) - L'ancien coureur espagnol de la formation Kelme, Jesus Manzano, a dénoncé mercredi des pratiques de dopage qu'il dit avoir connues dans le peloton cycliste, notamment sur les routes du Tour de France, au grand dam de son équipe et de la Fédération espagnole qui va porter plainte. Exclu de la Vuelta 2003 par Kelme qui n'a pas reconduit son contrat pour 2004, Manzano affirme, dans l'article "Ainsi se dope un cycliste", publié en deux jours (mercredi et jeudi) par le quotidien AS, que son équipe pratiquait les autotransfusions pour le Tour de France, qu'on lui a injecté un produit avant une étape de montagne qui l'a fait s'évanouir et qu'il a failli mourir au retour du Tour après une nouvelle autotransfusion.
Vicente Belda, le directeur sportif de Kelme, a répondu mercredi après-midi que "Manzano ne racontait pas la vérité."
Les déclarations de Manzano, qui a reconnu agir pour se venger de son équipe qui l'avait exclu du Tour d'Espagne en lui reprochant d'avoir eu des relations sexuelles avec une amie, "me donnent la nausée", a réagi Belda.
"Il ne raconte pas la vérité et il ne peut pas mettre tout le peloton dans le même sac. Les avocats de l'équipe travaillent sur l'affaire", a précisé Belda.
La Fédération espagnole (RFEC) a annoncé de son côté qu'elle aller porter plainte contre Manzano pour "protéger l'honneur de tout un collectif" et affirmé qu'il ne "faut pas donner pour généralisées les pratiques interdites" dans le cyclisme.
La RFEC va également ouvrir une enquête interne avec "des limites du cas, puisque le déclarant (Manzano) n'est pas licencié."
Jean-Marie Leblanc, directeur du Tour de France, a incité mercredi à la prudence: "Je ne peux m'empêcher de trouver douteuse cette vague de révélations, a-t-il déclaré à l'AFP. Je prends tout cela avec prudence. Les propos méritent d'être vérifiés."
Le directeur du Tour s'est déclaré "attentif" à cette situation d'autant que Kelme est en lice pour une invitation à la prochaine Grande Boucle (3-25 juillet). "Si, dans les jours qui viennent, il se confirmait que ce que dit Manzano est plus vrai que faux, nous en tirerions les conséquences", a affirmé Jean-Marie Leblanc en évoquant une non-sélection.
Les organisateurs du Giro ont adopté la même attitude "attentive" dans un communiqué mercredi.
Dans ses déclarations, Manzano évoque principalement les transfusions sanguines. "Au début du Tour (de France), on utilise peu de choses parce qu'on suppose que les traitements d'avant course doivent durer jusqu'à la fin de la première semaine. Le matin de la première étape de montagne, on avait essayé une substance que je n'avais jamais prise", poursuit Manzano.
"Le matin (de l'étape de Morzine), on m'a injecté 50 ml du produit. J'ai appelé ma petite amie et je lui dit: 'Prépare-toi. Aujourd'hui, je vais bien marcher, d'après ce que j'ai compris'. "A mi-étape, une échappée est partie. J'ai démarré. J'avais comme une sensation de fringale... Comme si le changement de vitesse était mou. C'était très bizarre. J'avais les mains endormies. Au bout de trois kilomètres après avoir démarré, j'ai commencé à avoir envie de vomir, j'avais très chaud avec des sueurs froides. Des sensations de très chaud et surtout de très froid. Je me sentais bizarre, j'avais des tremblements. J'ai continué pendant 500 m et je ne me rappelle plus de rien, si je suis tombé (...) J'avais l'impression que je m'en allais. Je me suis rendu compte que j'étais dans l'ambulance (...) J'avais l'impression d'avoir la langue gonflée, l'air ne rentrait plus. J'aurais voulu qu'on me fasse un trou dans la gorge (...) Plus tard, j'avais le ventre gonflé, je ne pouvais pas uriner, j'avais les tripes détruites", raconte Manzano.
Une fois revenue en Espagne, l'équipe lui aurait demandé de s'injecter le sang de l'autotransfusion non utilisée. "Au bout de 125 ml, j'ai commencé à me sentir très, très, très mal. J'avais plus froid qu'au pôle nord, en juillet à Valence. S'ils m'avaient mis le demi-litre, je serais dans une boîte en sapin", déclare toujours Manzano.
Un autre ancien coureur cycliste, le Français Philippe Gaumont, mis en examen il y a un mois dans le cadre de l'enquête Cofidis pour cession de substances vénéneuses, avait détaillé la semaine dernière dans la presse française les moyens qu'il a employés pour se doper à l'insu des contrôles.
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