Hamilton peut se faire du mauvais sang
Contrôlé positif, l'Américain pourrait se voir priver de sa médaille olympique. C'est la 1re fois qu'un sportif est pris pour avoir utilisé une transfusion de sang. Pour Phonak, il s'agit de la 2e histoire de dopage cet été après Oscar Camenzind.
Pour la première fois dans l'histoire de la lutte antidopage, un sportif, en l'occurrence le coureur américain Tyler Hamilton, champion olympique du contre-la-montre, a été déclaré positif pour avoir eu recours à une transfusion de sang, une méthode interdite jusqu'alors impossible à démontrer scientifiquement. Le contrôle positif a été confirmé par l'équipe Phonak, la formation suisse du coureur américain qui est devenu son chef de file l'hiver dernier.
Le coureur aurait été contrôlé à deux reprises. Une fois le 19 août, au lendemain de son sacre olympique dans le contre-la-montre à Athènes et une fois durant la Vuelta où il avait remporté la 8e étape, un contre-la-montre le 11 septembre avant de se retirer, six jours plus tard, officiellement pour cause de maux d'estomac. Dans l'attente du résultat de la contre-expertise, Hamilton est d'ores et déjà la première «victime» de la méthode d'un institut d'hématologie de Sydney, appliquée par deux laboratoires accrédités, Athènes et Lausanne.
Une médaille d'or en sursis
Le coureur du Massachusetts, passé l'hiver dernier de la formation danoise CSC à Phonak, a connu un été très contrasté. A la peine dans le Tour de France qu'il a abandonné dans les Pyrénées (13e étape), il a largement gagné le contre-la-montre des JO d'Athènes, le 18 août dernier, devant le Russe Viatcheslav Ekimov et l'Américain Bobby Julich. A cette occasion, Hamilton avait rendu un vibrant hommage à son préparateur italien Luigi Cecchini. Si l'Américain était disqualifié des JO, l'or reviendrait à Ekimov, déjà champion olympique du contre-la-montre à Sydney 2000, et l'argent à Julich. L'Australien Michael Rogers, champion du monde 2003 après le déclassement pour dopage du Britannique David Millar, récupérerait la médaille de bronze.
Agé de 33 ans, Hamilton est longtemps resté dans l'ombre de Lance Armstrong qu'il a servi jusqu'en 2001 dans l'équipe US Postal. Il est resté lié avec son ancien leader qu'il côtoie régulièrement pendant la saison européenne pour habiter dans le même immeuble sur la côte espagnole à Gerone. Parti chez CSC, le coureur américain a gagné notamment la doyenne des classiques, Liège-Bastogne-Liège, en 2003. Cette année-là, il s'est aussi signalé en bouclant le Tour de France malgré une clavicule cassée (vainqueur de l'étape de Bayonne et 4e au classement final).
Pour l'équipe Phonak, il s'agit de la deuxième affaire de dopage de l'été après le contrôle positif à l'EPO (erythropoïetine) du Suisse Oscar Camenzind. L'ancien champion du monde, licencié par sa formation, a mis fin à sa carrière avant d'être suspendu pour une durée de deux ans par le comité olympique suisse.
Un dopage sang pour sang
Hamilton, qui s'expose à une sanction de durée équivalente, a nié s'être dopé selon l'entourage de son équipe. L'Union cycliste internationale (UCI) a eu recours à une méthode qui, pour l'essentiel, permet de distinguer des populations différentes de globules rouges et, par conséquent, de déterminer avec certitude qu'il y a eu transfusion homologue (donneur compatible). Jusqu'à présent, la transfusion sanguine, dont les soupçons d'utilisation remontent à plus d'une trentaine d'années dans l'athlétisme, était indétectable. Elle a pour principal intérêt d'augmenter le taux de globules rouges et d'améliorer le transport d'oxygène jusqu'aux muscles.
Depuis 1997, le sang servait de support à des tests à partir desquels une mesure d'arrêt de travail - quinze jours minimum - pouvait être décidée. Mais, il ne s'agissait en l'occurrence que de soupçons de dopage sanguin (prise d'EPO, etc.). Pour la première fois, le sang a été utilisé à des fins de contrôle antidopage strict - débouchant sur de possibles sanctions - à l'occasion du dernier Tour de France (recherche d'hémoglobine synthétique). Le cyclisme, qui a ouvert la voie en matière de contrôles sanguins, compte logiquement le premier sportif positif en la matière.
Alvaro Pino, le directeur sportif de l'équipe suisse Phonak, dont le coureur vedette Tyler Hamilton a fait l'objet d'un contrôle positif (dopage par transfusion sanguine) en attente de contre-expertise, a affirmé mardi qu'il croyait en la parole et en l'innocence de l'Américain.
«Hier (lundi) soir, il m'a dit « Dors tranquille». Je crois en sa parole. C'est un gars intelligent qui ne prendrait pas le risque d'une transfusion», a affirmé Pino, en direct à la télévision publique espagnole au volant de sa voiture lors de la 16e étape du Tour d'Espagne cycliste. «Il y a le résultat (de l'analyse) mais il n'est pas définitif. Je ne peux rien vous dire de plus. Tyler doit donner une conférence de presse à Zurich à 18h ce mardi avec l'équipe...»
Hamilton a abandonné la Vuelta vendredi dernier, six jours après sa victoire dans la huitième étape. Il s'était imposé dans le contre-la-montre de 40,1 kilomètres à Almussafes, le 11 septembre.
«Il faut avoir des preuves. Il y a quelques temps on a fait toute une histoire avec un grand nom du cyclisme (Ndlr: livre sur son ancien coéquipier Lance Armstrong «L.A. Confidentiel») et à l'arrivée il n'y a rien. Hamilton est innocent tant que l'on ne démontre pas le contraire.» «Il ne faut pas non plus que ce contrôle de Hamilton soit répercuté sur l'équipe», a tenu à préciser Pino dont le coureur espagnol Santi Perez occupe la 3e place du général après avoir remporté deux étapes. L'ancien champion du monde suisse Oscar Camenzind, qui courait pour Phonak, a mis un terme à sa carrière cette saison après un contrôle positif.
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