Le directeur du Tour de France, Jean-Marie Leblanc, se dit « choqué » et « moralement trahi » après les révélations, parues mardi dans le journal L’Equipe, sur le dopage à l’EPO de Lance Armstrong durant le Tour 1999.
Jean-Marie Leblanc, que ressent la direction du Tour de France ?
Le Tour est choqué. On ne pouvait s'y attendre même si la personnalité de Lance Armstrong était controversée, sujette à une certaine suspicion à côté de l'admiration qu'il suscitait. J'oscillais pour ma part entre l'admiration et la prudence à cause des articles, des procès en cours. On peut dire qu'il n'a pas fait sept ans de vélo sur le cours d'un fleuve tranquille... Dès la première année, en 1999, il y a eu suspicion.
Mais pas de votre part ?
Je fais partie de ceux qui ont tenu compte de sa transformation physique après son cancer et de sa psychologie. Je pensais que la transformation morphologique et le caractère pouvaient expliquer la performance d'Armstrong. Avant qu'on ne me révèle qu'il y avait aussi adjuvant. Pour 1999, nous avons été trompés. Les gens qui organisent le Tour, les médias qui le couvrent, les spectateurs qui l'applaudissent, ont de quoi aujourd'hui être interloqués. Le dossier semble extrêmement solide, la crédibilité du laboratoire de Châtenay-Malabry est totale. Maintenant, il faut attendre les explications d'Armstrong et de son entourage.
Armstrong a réagi en qualifiant le dossier de journalisme à scandale...
On attend plus que cela.
Revenons-en aux certitudes...
Ce qui est certain, à la lecture de l'Equipe, c'est qu'on a trouvé des traces de produits interdits dans ses analyses. Comment cela a-t-il pu arriver, par qui, où, on ne sait pas. Il y a de fortes présomptions d'utilisation. Dans le contexte de 1999 où l'EPO était indétectable, sans doute un certain nombre de coureurs et de médecins ont-ils pu considérer que l'EPO ne serait pas retrouvée.
Les analyses rétrospectives par les laboratoires antidopage ouvrent-elles une nouvelle voie ?
C'est la petite lueur d'espoir de ceux qui luttent contre le dopage. Il faut lutter pied à pied, de façon permanente. Cela nous confirme dans les moyens d'investigation nécessaires pour que les tricheurs ne soient pas impunis.
« Remettre à jour le règlement »
Mais, cette fois, Armstrong ne risque aucune sanction sportive si sa culpabilité est avérée...
C'est, hélas, le contexte législatif et réglementaire qui l'impose puisque les fameux droits de la défense ne peuvent être respectés. Sans doute ce contexte va-t-il être changé du fait que la science donne des moyens supplémentaires. Il faudra remettre à jour le règlement disciplinaire pour en tenir compte. Les organisateurs du Tour, les autres organisateurs, devront sans doute accomplir une demande en ce sens. Là, on est dans le domaine des hommes de loi.
Compte tenu du préjudice, le Tour pourrait-il demander des réparations directes ?
Je ne pense pas que les textes le permettent. On ne pourrait s'associer à une demande de réparation que si les pouvoirs sportifs, ceux qui peuvent sanctionner, le faisaient. On serait avec eux.
Les autres victoires d'Armstrong sont-elles également suspectes ?
Elles peuvent être suspectes de tâches. Mais je ne veux pas aller trop vite. Je suis de ceux qui pensent que les coureurs et les médecins ont été plus regardants, plus précautionneux, à partir du moment où l'EPO a été détectable. Un type peut commettre une erreur dans une vie. Cela m'est arrivé, cela est arrivé à tout le monde. Tout le reste n'est pas pour autant entaché automatiquement.
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