Jean-Michel Thénard
Qu'un homme qui a réchappé au cancer gagne un Tour de France, cela peut être le miracle du sport. Mais qu'il en remporte sept d'affilée, cela finit par instiller le doute. Désormais preuve est apportée qu'Armstrong n'est pas tout blanc et qu'il ne doit pas aux seules barres énergétiques les trompettes de sa renommée. Même au pays merveilleux du cyclisme professionnel, les contes de fées ont leurs limites. Le Texan qui vététise avec Bush a donc consommé de l'EPO en 1999, comme Virenque un an plus tôt. La différence entre l'Américain et le Français, c'est que le premier ne s'est pas fait prendre, ce qui établit certes une hiérarchie mais pas celle du mérite. Les cris d'orfraie du milieu cycliste qui feint de découvrir la lune à propos d'Armstrong font plaisir à entendre. Ils illustrent assez bien le Don Juan de Molière : « La profession d'hypocrite a de merveilleux avantages. » Tout le monde savait, et tout le monde a laissé faire. Convenons que le soupçon ne vaut pas preuve, ce qui est un bon principe de l'Etat de droit. On ne reprochera donc pas aux instances sportives de n'avoir pas sanctionné une prise d'EPO alors indétectable. Maintenant que la preuve est là, en revanche, il est souhaitable que la sanction tombe, sévère. Puisque le contrôle a posteriori s'avère scientifiquement solide, il serait incompréhensible que juridiquement cela ne suive pas. Et laisse au tricheur son titre entaché en l'état. Ce serait même funeste pour le Tour dont la crédibilité est largement en cause. Si son recordman de victoires est celui qui a le mieux fraudé, ne vaut-il pas mieux alors réduire l'épreuve au tour du Labo de Châtenay-Malabry ? Quant à l'éthique sportive, elle n'a rien à gagner à ce que demeure consacré celui dont la science a établi qu'il a triché, lequel se consolera en conservant sa fortune à défaut de sa gloire.
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