La mise à jour de la tricherie de Lance Armstrong lors du Tour de France 1999, première victoire à partir de laquelle il a fondé sa domination sur le cyclisme, est un rude coup, un de plus, porté à ce sport plus que centenaire, magnifique, aujourd'hui totalement décrédibilisé. Après le séisme de 1998, ce qui était présenté comme le plus grand exploit du sport, la victoire d'un survivant du cancer, s'avère être l'arnaque du siècle sans que personne ne soit vraiment surpris.
Frederic Waringuez
Les relations entre Leblanc et Armstrong virent à l'orageux...Depuis 1998 et le séisme de l'affaire Festina qui a révélé la réalité d'un cyclisme gangrené par le dopage, la suspicion accompagne le peloton 365 jours par an. Les contrôles anti-dopage de plus en plus performants, voire les interventions policières, apportent régulièrement des preuves qui démontrent que le dopage est encore largement ancré dans le cyclisme. Ces dernières semaines, Dario Frigo et Fabrizio Guidi ont été épinglés. La routine... Le cas Armstrong sort de l'ordinaire sur le fond et sur la forme. Sur le fond parce que l'Américain est un champion au palmarès hors-normes et sur la forme parce que, si les preuves apportées par L'Equipe semblent irréfutables, elles sont de nature à être contestées, ce que le Texan ne se prive pas de faire.
Plus que la mise en évidence d'un énième cas de dopage, c'est le mythe que l'Américain a bâti sur son histoire personnelle hors du commun qui est remis aujourd'hui en cause. Non, l'homme qui a survécu au cancer, n'a pas, deux ans plus tard, remporté le Tour de France par la seule force de son caractère et grâce à sa fréquence de pédalage. A l'époque, l'exploit du Texan avait suscité beaucoup d'interrogations alors que l'on courait sur les ruines de 1998. Le Tour qui, un an auparavant, était au bord du gouffre, s'était alors emparé du joli conte de fées comme une aubaine.
Non-dits et suspicions
C'était inespéré en effet, alors que l'ambiance entre coureurs et journalistes était détestable, de disposer d'une si belle histoire pour oublier les vilains moutons noirs de Festina. Et Jean-Marie Leblanc, qui continue de faire rire par son angélisme et sa naïveté, lui qui se trouve au plus près de la chose cycliste et qui fut coureur lui-même, a beau jeu aujourd'hui de réclamer des comptes à l'Américain qu'il avait accueilli à bras ouverts, comme un soldat abandonné accueille la cavalerie venue sauver une situation perdue.
Depuis l'affaire Festina, le cyclisme est en effet devenu un jeu de dupes. La suspicion généralisée fait face à l'omerta légendaire du peloton, à peine moins opaque aujourd'hui qu'en 1998. Les anciens champions jouent la solidarité avec ceux d'aujourd'hui faisant mine de préférer regarder vers l'avenir quand on leur propose de s'intéresser à un passé récent effectivement pas tout rose. Laurent Fignon, si admirable autrefois sur son vélo, se scandalise aujourd'hui qu'on ose revenir six ans en arrière comme si son propre honneur était en jeu. Qu'y a-t-il de si gênant à traquer le dopage ? Pourquoi faudrait-il s'en accommoder ? Les tenants du politiquement correct s'offusquent ainsi qu'on puisse ne pas se satisfaire de la vérité officielle, celle délivrée par l'UCI à travers les contrôles réalisés, sans doute nombreux, mais encore loin d'être totalement efficaces.
Ce sont encore ces anciens, de Laurent Fignon à Laurent Jalabert, qui lors du dernier Tour de France, n'ont cessé de critiquer les coureurs, effarés par leur propre incapacité à suivre le rythme, qui parlaient d'un cyclisme à deux vitesses, préférant mettre l'absence de résultats des Français sur le compte d'un manque de travail... L'affaire Armstrong démontre aujourd'hui que les dopés, en 1999, sont encore passés entre les mailles du filet. Les cyniques, dénoncés dans un discours par l'Américain en conclusion de sa carrière après l'arrivée sur les Champs-Elysées en juillet dernier, persistent à penser que, malgré tous les progrès de la lutte anti-dopage, les mailles sont encore trop larges et que les tricheurs continuent de s'y engouffrer joyeusement, au point que la compétition cycliste, malheureusement, laisse encore trop souvent le goût d'une vaste supercherie.
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