Jérôme Rasetti
BERLIN
Un mois après avoir exclu Jan Ullrich du Tour de France, T-Mobile a déchiré dimanche le dernier témoignage de son association avec le cycliste allemand le plus célèbre de l'histoire, en rompant avec Olaf Ludwig qui n'a jamais condamné le probable recours au dopage de son ancien leader.
Un Tour de France (1997) et quatre 2e place dans la course à étapes la plus prestigieuse du monde (1996, 1998, 2000, 2001) sous le maillot magenta n'ont finalement pas pesé bien lourd.
Soupçonné d'avoir utilisé les services du médecin espagnol Eufemiano Fuentes, au coeur du réseau de dopage sanguin démantelé par la police espagnole, Ullrich, 32 ans et douze saisons chez Telekom/T-Mobile, est devenu soudain trop encombrant pour son parraineur, l'opérateur de téléphonie mobile aux 90 millions d'abonnés dans le monde.
Le seul Allemand à avoir remporté le Tour de France est passé en moins de temps qu'il n'a fallu à ses anciens coéquipiers pour boucler le Tour 2006, d'icône publicitaire incontournable à collaborateur indésirable: le 30 juin, il était suspendu, puis licencié le 21 juillet.
Désacralisé
Sitôt l'idole Ullrich désacralisée, T-Mobile s'est lancé, comme pris de panique, dans une campagne "vélo propre": la formation allemande a ainsi révélé qu'un de ses coureurs, l'obscur rouleur allemand Jörg Ludewig, avait "eu des contacts avec le monde du dopage" en 1998 alors qu'il n'était pas sous contrat avec... T-Mobile.
Les responsables de l'équipe ont ensuite annoncé publiquement qu'ils avaient demandé à l'Australien Michael Rogers, l'Allemand Patrik Sinkewitz et l'Italien Eddy Mazzoleni, de mettre fin à leur collaboration avec le sulfureux préparateur italien Michele Ferrari.
Pendant qu'Andreas Klöden et ses six équipiers sauvaient les meubles sur le Tour de France grâce à sa troisième place au général, les dirigeants de T-Mobile finalisaient en coulisses la "désullrichisation".
Elle passe par la campagne lancée par la Fédération allemande (BDR) pour rendre sa crédibilité au cyclisme après l'opération "Puerto" en Espagne et le contrôle positif de Floyd Landis.
En marge de la Cyclassics de Hambourg, les plus hauts dirigeants de T-Mobile ont assuré le président de la BDR, Rudolf Scharping de leur soutien à son plan d'action qui prévoit la mise en place d'un suivi longitudinal et l'accroissement des contrôles antidopage à l'entraînement.
Cyclisme d'alcôve
Dans le même temps, les têtes tombent : le cas Rudy Pevenage, le directeur sportif et mentor d'Ullrich, a été rapidement réglé début juillet par voie de licenciement.
Olaf Ludwig, grand patron de l'équipe depuis janvier, a appris dimanche que sa société OLC, qui détient l'indispensable licence ProTour, perdait le soutien de T-Mobile fin octobre.
L'ancien professionnel, champion olympique sur route en 1988 sous le maillot de la RDA, n'a jamais condamné publiquement Ullrich et représente un cyclisme avec des zones d'ombres que T-Mobile récuse désormais.
La révolution culturelle se poursuivra fin août, a déjà assuré T-Mobile, et concernera les coureurs: exit sans doute les "coureurs à l'ancienne" comme Eddy Mazzoleni et Serhiy Honchar, tandis que Klöden, dont le contrat expire fin 2006, pourrait payer le prix de son amitié avec Ullrich.
Le nouveau grand patron de T-Mobile est déjà connu: un Américain, ancien chef d'entreprise et millionnaire, Bob Stapleton qui pourrait miser sur les jeunes Linus Gerdemann et Patrik Sinkewitz, pour éviter les mauvaises surprises associées à bien des grands noms.
Le nom de la société qu'il a créé pour bénéficier d'une licence ProTour, a tout d'un programme : "Nouvelles routes".
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