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7 août 2006

Suite au résultat positif de l'échantillon B, l'Américain perd son maillot jaune ­ une première dans le Tour ­ et continue de nier.

Landis «chargé», détrôné, viré, radié et questionné

Christian Losson

C'en est presque moche. Depuis que la confirmation du dopage de Floyd Landis à la testostérone est tombée, samedi, on regretterait presque le crépuscule de défense fort-chabrolesque du cycliste américain. Fini les deux bières et les quatre whiskies imbibés par le coureur à la hanche tellement en pâté qu'elle lui autorisait, via un «justificatif thérapeutique», l'usage de corticoïdes ? Fini cette fâcheuse déficience thyroïdienne qui aurait déréglé la belle mécanique biologique du coureur, aussi sensible que la soie de Bénarès ? Fini, enfin, cette anomalie naturelle qui aurait vu ses testicules en sécréter en surdose industrielle par la grâce du Seigneur ? Fini ­ mince, on allait l'oublier ­ la «déshydratation», au fâcheux inconvénient de concentrer l'urine et de faire bondir comme un cabri le taux testostérone/épitestostérone (T/E) ?

Joli ratio
L'échantillon B est passé au crible du labo national de lutte antidopage. Comme prévu ( Libération du 2 août), le procédé de spectrographie de masse isotopique démontre, de façon irréfutable, la prise de testo exogène. C'est-à-dire extérieure. «Il y a dopage, point barre», dit un responsable de Châtenay-Malabry. Sur un joli ratio T/E de 11 (la limite est de 4). «Le dopage, c'est tout sauf un produit unique, explique un expert de l'Agence mondiale antidopage. Landis avait bloqué la veille du contrôle à cause d'un "raté pharmaco".» Trop de corticos ? «Joyeux cocktail à base d'insuline et de testo en patch ou comprimé. Mais l'interaction médicamenteuse a peut-être modifié son métabolisme...» La réaction de Landis confine au sublime : «J'étais le plus fort sur le Tour et c'est pourquoi je l'ai gagné.» Le gars baigne tant dans la culture de la dope qu'il est persuadé qu'il est propre et/ou meilleur. Enfin, jusque-là.

Reprenons, donc. Convaincu de s'être chargé, Landis va perdre son maillot jaune (une première dans l'histoire du Tour). Il va devoir renvoyer par la poste le petit chèque de 450 000 euros. Il s'est fait licencier dans la minute par son équipe (Phonak), qui a bientôt plus de vélos que de cyclistes, vu que huit de ses coureurs ont eu un goût immodéré pour les produits interdits. Il devrait écoper d'une sanction de deux ans. En sus, dans le beau monde pro du vélo où les grandes écuries assurent se piquer d'éthique, il devrait avoir du mal à rejoindre, pendant deux ans de rab, une équipe d'élite du ProTour.

Landis ne pourra, là au moins, faire comme s'il tombait des nues. Connaissait le tarif, Floyd. A 30 ans, récolter quatre ans de mise au bord des routes, ça semble presque bâché. Mais depuis Armstrong, premier avocat de Landis, l'on sait que les résurrections existent. Si Lazare se réincarnait, y ferait du vélo. Les avocats de Landis le croient. Ou veulent le croire : ils sont payés pour. Ils connaissent leur missel sur le bout des ongles : «Lève-toi et roule !» L'avocat José Maria Buxeda a ainsi bataillé pour tenter de sortir l'Espagnol Heras de la nasse d'un dopage à l'EPO lors de la Vuelta 2005. Il a mis six mois avant de jeter l'éponge. Howard Jacobs, l'avocat de Landis a, lui, un joli CV à son actif (Tyler Hamilton, Tim Montgomery) et espère s'en servir pour causer «procédure». Il compte chercher des poux à l'Union cycliste internationale (UCI), coupable, selon lui, d'avoir divulgué «de façon prématurée» les résultats positifs de l'échantillon A. Pour une fois que l'UCI sortait un cas. «Avec des experts médicaux et scientifiques, nous prouverons que la victoire de Floyd dans le Tour s'est faite sans substances prohibées», assure Jacobs. Fichtre !

Mistigri
On l'aura compris : pour le suiveur, l'heure de la formation permanente a sonné. Il a tenté d'être journaliste sportif tout en gardant un oeil sur le Vidal. Il a troqué son habit de lumière pour celui, plus obscur, de pharmacologue et de petit chimiste, pour s'interroger sur ce qui circule dans les veines des cyclistes et dans les fioles des «Drs Jabuse». Voilà qu'il doit revêtir une robe noire et se plonger dans le droit, les recours et le barreau. Une autre course débute. Après l'étape suspicion (ils volent un peu trop, ces coureurs), le col sécrétions (naturelle ou pas, cette testo), voici le contre-la-montre de la judiciarisation.

Là, il va falloir du souffle. Voyons : l'UCI a transmis le mistigri Landis à la fédération américaine de cyclisme, qui l'a refourgué à l'Usada, l'Agence antidopage américaine. Landis aura dix jours pour répondre aux documents qui lui seront soumis. Quand l'Usada fera tomber le couperet, l'Américain aura la possibilité de contester la décision devant un panel de juges américains. Et, in fine, porter l'affaire devant le Tribunal arbitral du sport (TAS). En attendant, l'Espagnol Pereiro, deuxième sur les Champs, s'est dit vainqueur à 99 % du Tour. Pourquoi ? Il doute ?


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Guy Maguire, webmestre, SVPsports@sympatico.ca
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