Se garder en forme...
et voir du pays !
Au moment d'ébaucher les résolutions du Nouvel An, pourquoi ne pas mettre l'accent sur des projets joignant l'utile à l'agréable afin de mieux résister aux assauts quotidiens de la table et du stress sur notre forme physique ?
Tous les kinésiologues de ce monde - comme on appelle maintenant les spécialistes de l'activité physique - confirmeront qu'un programme de mise en forme a d'autant plus de chances de succès qu'on saura y intégrer des notions de plaisir.
Aller se faire suer dans un centre intérieur de conditionnement physique quand on est un amant inconditionnel de la nature, c'est comme lancer Don Quichotte sur un chemin truffé de moulins à vent...
Les solutions plaisantes ne sont pas toujours faciles à dénicher mais elles valent amplement les heures de recherche qu'on y consent et les dollars qu'on y investit éventuellement.
Tourisme sportif
À ce chapitre, la combinaison sport et tourisme présente un riche potentiel.
Au cours de la dernière décennie, j'ai fait quelques voyages de ski de fond en Europe pour prendre part à des marathons du circuit de la Worldloppet.
À la suite de séjours en Suède, en Allemagne, en Suisse, en Autriche, en République tchèque et en Italie, j'ai conservé des souvenirs fabuleux de ces incursions dans des régions souvent reculées et peu fréquentées par les touristes dont je suis revenu avec un engouement renouvelé pour mon sport de prédilection.
Un phénomène semblable s'est produit à la suite d'un voyage de cyclotourisme d'une durée d'une semaine à Cuba, vécu à la fin de novembre à l'invitation de Cyclo-services et d'Air Transat.
Les quinze autres participants à cette expédition stimulante et revigorante sont revenus enchantés (et même plus!) de leur séjour dans la partie sud-est de Cuba, non loin de la base américaine de Guantanamo.
Avant de prendre congé au cours des deux prochains week-ends, je vous livre les commentaires de trois Marcel, d'un ancien dg du cégep du Vieux-Montréal et d'une armoire à glace, surnommée Shrek, qui ne demandent pas mieux que de vivre de nouveau une aventure sur deux roues.
La pratique régulière du sport à 60 ans...
Les trois Marcel correspondent au profil parfait du cyclotouriste.
Martin Smith
«Ils sont au tout début de la soixantaine, ils ont les moyens et le temps de loisir nécessaires pour faire du tourisme sportif», souligne Jean-Marc Laprise, propriétaire de la boutique Cyclo-services qui organise depuis huit ans des séjours de vélo à Cuba.
«Ils sont aussi de la première vague de gens à avoir pris conscience que la pratique régulière du sport est synonyme de meilleure qualité de vie.»
Marcel Hénault est notaire. Marcel Lafortune, un ami des quarante dernières années, est dentiste. Les deux sont en pré-retraite, travaillant trois jours par semaine.
Marcel Archambault, un ami plus récent, est retraité après avoir été commerçant en matériaux de construction.
Résidant tous les trois dans les Basses-Laurentides, ils ont décidé avec Denise, Monique et Marceline - leurs conjointes respectives - de conjuguer ensemble découverte d'un pays et activité physique.
Horloge biologique
«À notre âge, c'est encore plus important de continuer à faire du sport car on dirait que ça ralentit l'horloge biologique», raconte Marcel Hénault.
«Dans mon corps, je n'ai pas 62 ans. En ski alpin, je fais des choses que je ne faisais pas à 45 ans. Je descends des pentes plus abruptes, je prends plus de risques, je retire une grande satisfaction à relever des défis.»
Des bienfaits physiques et psychologiques aussi évidents pour son homonyme dont l'amitié remonte à leurs années au collège de Joliette au milieu des années 1960. L'occasion était d'autant plus tentante pour Marcel Lafortune qu'elle se faisait avec des amis.
« Plus on vieillit, plus ça devient difficile de trouver des partenaires, souligne Marcel Lafortune. Certains deviennent plus craintifs. En ski de fond, je ne trouve plus de partenaires avec qui faire vingt kilomètres.
«Et puis, forcément, d'autres disparaissent comme notre ami Lorne qui a succombé dernièrement à un cancer généralisé. Je ferai du sport aussi longtemps que je pourrai, car même si ça ne m'assure pas de vivre plus longtemps, ça me permet à tout le moins une meilleure qualité de vie.»
Pour Marceline, le dépassement de soi a été aussi facilité par la présence de complices et de partenaires.
«Marcel et moi avons fait des voyages de ski alpin et de randonnée pédestre dans le passé, mais nous avons trouvé motivant de pédaler en groupe, a-t-elle dit. Ça donne l'énergie qui pourrait manquer à un moment donné pour gravir une côte un peu longue.»
Prémbule à l'hiver
Tous les participants au premier séjour cubain de la saison ont pédalé de 200 à 600 kilomètres, selon leur capacité, dans le sud-est de Cuba grâce à des circuits en boucles depuis les villes de Holguin et de Bayamo. Un tel voyage coûte de 1500 $ à 2400 $.
Pour un groupe de quinze cyclistes ayant une moyenne d'âge de 56 ans, c'est un bon préambule à la saison hivernale.
«Le groupe était assez petit pour qu'on apprenne à se connaître vraiment», souligne Alain Lallier en pré-retraite apres avoir été directeur général du cégep du Vieux-Montréal pendant douze ans.
«On a découvert un pays comme bien peu de touristes parviennent à le faire et, en plus, on revient une semaine plus tard avec les mollets endurcis et le coeur rajeuni.
«Avec une hausse du nombre de retraités intéressés à se maintenir en forme, on peut s'attendre à voir ce genre d'initiatives se multiplier», conclut-il.
Vaincre une grave embolie pulmonaire
Shrek n'oubliera jamais sa première expérience de cyclotourisme. Il lui doit en partie de continuer à savourer la vie. Rien de moins !
Martin Smith
«Si je n'avais pas été en forme, je passerais peut-être dans les pages nécrologiques aujourd'hui», confirme cet homme, âgé de 49 ans.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, laissez-moi vous présenter le personnage.
Le boute-en-train du groupe a hérité de son surnom à cause de sa carrure d'armoire à glace, aussi impressionnante que celle du héros du célèbre film d'animation.
Un ogre d'homme donc, doté d'une générosité sans bornes et d'un sens de l'humour décapant.
Pour diverses raisons, ce spécialiste montréalais de la finance et ex-avironneur d'élite, membre de l'équipe olympique canadienne de quatre de couple lors des Jeux de 1976, préfère garder un certain anonymat en étant désigné par son surnom.
«Le message est plus important que le messager», explique-t-il.
Embolie pulmonaire extrême
Deux semaines après le voyage de cyclotourisme où il roulé plus de 600 kilomètres, Shrek a été hospitalisé d'urgence à la suite d'une variante du «syndrome de la classe économique» ainsi nommé pour les problèmes de circulation sanguine associés aux longs voyages aériens durant lesquels les mouvements sont restreints.
«Ma jambe droite a enflé énormément dans les jours suivant un aller-retour en auto vers New York», raconte-t-il.
«J'ai passé une bonne vingtaine d'heures à conduire dans des conditions très difficiles pendant la fin de semaine où le nord-est des États-Unis a été enseveli sous la neige.»
Croyant à un problème musculaire après toutes ces heures de conduite sous tension et sans pause digne de ce nom, Shrek a consulté Gaétan Lefebvre, un bon ami et ex-thérapeute sportif du Canadien.
«Il a vite écarté toute cause musculaire, raconte Shrek. L'intuition pratique de Gaétan lui a permis de déceler une phlébite. Comme je ressentais aussi des problèmes respiratoires, mon docteur m'a fait hospitaliser à toute vitesse.»
Des tests ont permis de diagnostiquer une embolie pulmonaire.
De nombreux caillots de sang obstruaient des ramifications artérielles irriguant le poumon. D'autres s'étaient accumulés dans le ventricule droit du coeur.
«Mon coeur et mes poumons subissaient une attaque si sérieuse qu'il a fallu m'administrer un traitement extrême risquant de provoquer un accident vasculaire cérébral, raconte Shrek. J'ai eu peur de mourir, mais tout s'est finalement bien passé.»
«La patient est-il mort ?»
«Le spécialiste a fait une remarque que je n'oublierai jamais. Il a dit : C'est rare qu'on voit un scan pareil! En le voyant, une infirmière a demandé si le patient était mort!»
En dépit d'un excès de poids, Shrek est dans une très bonne forme et possède une capacité cardio-vasculaire hors de l'ordinaire.
«J'ai toujours fait de quatre à cinq heures de sport par semaine parce que ça permet de me sentir bien dans ma peau, dit-il. Aujourd'hui je m'en félicite parce que c'est une police d'assurance fantastique quand un problème physiologique surgit.
«Le spécialiste a confirmé que mes chances de m'en sortir auraient été très diminuées si je n'avais pas été en forme.»
Shrek n'oubliera jamais son voyage de cyclotourisme à Cuba qui a élevé son niveau de forme physique à un moment crucial.
«Je vais m'en rappeler chaque fois que je regarderai le scan laminé sur le mur de mon bureau», lance-t-il dans un grand éclat de rire.
À lire également : Découvrir Cuba à vélo
page mise en ligne le 20 décembre 2003 par SVP