HAMILTON - Geneviève Jeanson est une petite cachottière. Pas plus tard que lundi, elle affirmait, sans grande conviction, espérer une place dans les 10 premières au contre-la-montre des Championnats du monde de cyclisme sur route.
La cycliste de Lachine visait plus haut, beaucoup plus haut. En fait, elle se voyait sur le podium. Voilà pourquoi Jeanson avait tant de difficultés à se satisfaire complètement de la superbe cinquième place qu'elle a décrochée au terme de l'épreuve de 20,8 kilomètres, hier après-midi, au centre-ville de Hamilton.
On a compris l'ampleur de sa déception lorsque sa rencontre avec les journalistes a été brusquement stoppée par une information qui a filtré à travers un talkie-walkie : « Jeanson, quatrième ». (Elle apprendra un peu plus tard qu'elle avait plutôt fini cinquième).
La cycliste de Lachine a fait une pause avant que les larmes ne viennent embrouiller ses yeux. « Quand on se prépare, on ne peut pas vraiment penser aux résultats. Mais je vous mentirais si je vous disais que je n'avais pas un podium derrière la tête », a soufflé celle qui avait fini 14e de cette épreuves aux Mondiaux de 2002.
Jeanson a concédé 48,49 secondes à la gagnante, l'Espagnole Joane Somarriba, qui a complété l'épreuve en 28.23,23 (moyenne de 44 km/ h). La triple gagnant de la Grande Boucle féminine a devancé l'Allemande Judith Arndt (+10,78s) et la Russe Zoulfia Zabiroya (+26,25), championne en titre. La Suissesse Karin Thurig a fini quatrième. Fait à noter, les quatre prenùères sont âgées de 27 à 31 ans, comparativement à 22 ans pour Jeanson.
Sixième de l'épreuve, la Française Jeannie Longo Ciprelli, 44 ans bien sonnés, ne s'est pas laissée duper par les ambitions modestes de Jeanson. « On savait que tu te préparais en Arizona, on te suivait sur Internet. On savait que tu pouvais gagner... » a lancé la Grande Dame du cyclisme à la jeune Québécoise. « Elle est très courageuse pour son âge », a affirmé Longo quelques minutes plus tard.
Analysant sa course, Jeanson a estimé ne pas voir de sections où elle aurait pu aller plus vite. « J'étais dans le sang pas mal partout. Dans la dernière montée, ça m'a rentré dans le foie avec l'acide lactique et compagnie. Mais que ça fasse mal, c'est ça qu'il faut ! »
Troisième au chrono intermédiaire (km 8), Jeanson a probablement perdu des secondes précieuses dans la dernière descente menant à la ligne d'arrivée. « À 108 ou 109 livres, c'est sûr que tu descends moins vite que des filles qui en pèsent 120. Ce n'était pas un parcours conçu exactement pour moi. »
Et vous savez quoi? La Lachinoise a finalement pu compter sur la présence de son entraîneur André Aubut dans la voiture suiveuse. Ce dernier était accompagné de l'entraîneur-chef Yuri Kashirin. Aubut et Jeanson ont d'ailleurs amplement remercié les gens de l'Association cycliste canadienne (ACC) pour ce geste. « J'étais privilégiée d'avoir les deux dans l'auto », a souligné Jeanson.
Alors, pourquoi tout cet ergotage de la veille ? N'étant pas un entraîneur national certifié, Aubut ne pouvait pas recevoir d'accréditation officielle de l'Union cycliste internationale. Les gens de l'ACC tenaient donc à être absolument certain que la présence d'Aubut dans la voiture ne poserait pas problème, a expliqué Yvan Waddell, gérant de l'équipe canadienne. « D'un pays à l'autre, ça peut varier, a dit ce dernier. Yuri est aussi venu me voir la veille pour me donner son O.K. Il a fait preuve d'un bel esprit sportif. » Bref, tout est bien qui finit bien.
page mise en ligne le 9 octobre 2003 par SVP