Alexandre Pratt
Le taux d'hématocrite de Geneviève Jeanson aux derniers Championnats mondiaux cyclistes de Hamilton restera secret.
Dans une lettre envoyée à La Presse, l'athlète québécoise explique son refus de divulguer son taux, qui dépassait la limite de sécurité fixée à 47 permise par l'Union cycliste internationale (UCI).
« J'ai appris que vous me mettiez au défi de dévoiler mon taux d'hématocrite et de fournir des explications pour dissiper les soupçons. Alors je vous écris pour vous dire que je ne relèverai pas votre défi », indique-t-elle à notre chroniqueur Pierre Foglia, le destinataire de sa lettre.
Depuis qu'un test sanguin effectué le 11 octobre a montré un nombre anormalement élevé de globules rouges dans son sang (quantifié par le taux d'hématocrite), Geneviève Jeanson est la cible d'allégations de dopage. La cycliste s'est défendue en imputant son taux élevé à l'utilisation d'une chambre hypoxique, un procédé autorisé. Or, plusieurs observateurs ont insinué que son taux élevé pourrait aussi résulter d'une consommation d'EPO, un produit dopant qui fait augmenter le taux d'hématocrite. Un test urinaire pris le même jour que le test sanguin n'a toutefois montré aucune trace d'EPO.
« Les soupçons, je vis avec (eux) depuis l'âge de 15 ans, écrit-elle. Depuis que je gagne des courses. Je ne m'habitue pas, mais je vis avec ( ... ) Même si je ( le )voulais, je ne pourrais pas prouver que je ne me dope pas. Personne n'est capable de prouver qu'il ne se dope pas. »
Néanmoins, son taux anormal d'hématocrite l'inquiète. Après l'analyse du test sanguin, les médecins de l'UCI l'avaient d'ailleurs empêchée de participer à la course sur route des Championnats mondiaux.
« Tout le monde a l'air de penser que (lorsque) l'UCI parle d'inaptitude à courir pour des raisons de santé, c'est une joke. Je suis peut- être naïve, mais moi, je ne prends pas ça pour une joke. Ma santé, je ne veux pas prendre de chance avec ça. Hématocrite à 49 ou 53, ce n'est pas ça, le problème. Le problème, c'est qu'à Hamilton, mon hématocrite dépassait la limite de sécurité de l'UCI. Et ça m'inquiète. En fait, depuis deux semaines, c'est la chose qui me préoccupe le plus. »
« Je veux savoir ce qui s'est passé, poursuit-elle. Moi aussi, je veux savoir si c'est juste la tente, ou s'il y a pu avoir autre chose. Je sais que j'étais déshydratée après le contre-la-montre, est-ce que ç'a pu jouer? Je n'en ai aucune idée. Personne au monde n'est plus intéressé que moi à trouver une explication. Alors, c'est sûr que je vais aller voir un spécialiste, peut-être plusieurs. Et c'est sûr que je vais me faire suivre de près par un spécialiste en médecine sportive, puis par d'autres spécialistes s'il le faut. Je m'en veux de ne pas l'avoir fait avant. »
La cycliste termine sa lettre par une charge contre ses détracteurs, qu'on devine être notamment ses coéquipières au sein de l'équipe canadienne, Lyne Bessette et Manon Jutras. « Ce n'est pas à moi de prouver que je ne me dope pas, c'est à ceux qui disent que je me dope de le prouver. S'ils ne sont pas capables, j'aimerais ça qu'ils se taisent. »
page mise en ligne le 28 octobre 2003 par SVP