Sur deux roues au pays de Castro
HOLGUIN, Cuba - Les souvenirs ne se limitent pas au bitume et à la sueur mais collent à la peau quand on choisit de joindre l'utile à l'agréable en roulant à vélo pour découvrir un pays comme Cuba.
Une quinzaine de cyclotouristes québécois l'ont rapidement constaté à la fin de novembre. Cinq couples et cinq voyageurs solitaires ont choisi cette période de l'année pour sortir de la morosité du climat québécois et mettre le cap sur le soleil du sud.
La très vaste majorité en était à une première expérience du genre et a opté pour l'expédition offerte depuis huit ans par Cyclo-Services de Québec afin de doubler la valeur de son investissement en se mettant aussi en forme avant l'hiver.
Les bienfaits physiques se font évidemment sentir après avoir passé une semaine chargée à pédaler sur une distance cumulative de 250 à 625 kilomètres, selon les cas, sur les routes de l'Oriente cubain.
Au départ de Mirabel, le petit groupe de cyclistes se distinguait nettement parmi les quelque 400 passagers qui remplissent le gros porteur d'Air Transat.
C'est presque à 1'unanimité que ces Québécois s'en allaient se faire dorer la couenne et se saucer dans la mer pendant une semaine ou deux en vivant dans l'environnement ultra-sécuritaire d'un des six hôtels de la région de Guardalavaca, offerts en forfaits tout inclus par Vacances Air Transat.
« La vie nocturne y est particulièrement animée », promet-on dans les dépliants promotionnels. « À la tombée de la nuit, une promenade romantique sur la plage et un cocktail feront rapidement oublier aux vacanciers les aléas du travail et du climat de leur pays d'origine... »
Diverses coutures
Rien de tel pour les vaillants cyclistes qui seront aussi dépaysés que charmés par l'immersion complète dans la vie cubaine qui leur a été offerte jour après jour.
Sous des coutures gourmandes. En dehors des incontournables buffets hôteliers du déjeuner et du souper, il a été possible de savourer de véritables banquets dans des petites pensions locales, nommées « paladors», où les cuisinières nous ont rassasiés avec des dorades, des langoustines et d'autres plats invariablement savoureux.
Sous des coutures culturelles. En passant des soirées dans le parc central de Holguin où les gens se regroupent pour socialiser le soir, à défaut de pouvoir s'écraser devant leur téléviseur. Aussi dans ce pays friand de musique, en dansant sur les airs les plus entraînants des rythmes son et guajira à la « Casa de la Trova » de Bayamo.
Sous des coutures socio-économiques. En découvrant les ravages du blocus américain qui prive les Cubains d'à peu près tout bien de consommation et de première nécessité. Du pétrole aux médicaments en passant par la peinture, les pièces de rechange mécaniques, les véhicules et... le reste.
Sous des coutures dramatiques, aussi. Lors du dernier jour, sur la route menant de Bayamo aux contreforts de la Sierra Maestra d'où Fidel et ses révolutionnaires ont mené leur lutte, un attroupement s'était créé près d'un camion arrêté au milieu de la chaussée. Entre ses roues, une énorme mare de sang. Notre guide Victor expliquera plus tard qu'un homme, victime d'une inattention, est mort écrasé devant son domicile. « Ça arrive parfois comme dans n'importe quel pays », lance Victor.
En dépit de toutes les difficultés auxquelles les Cubains sont confrontés, ils restent fiers et propres, même s'ils doivent constamment se débrouiller avec trois fois rien.
Jamais les cyclotouristes n'auraient pu découvrir le « Cuba profond » s'ils avaient opté pour la traditionnelle semaine de plage et de soleil. Personne ne l'a regretté!
Mer et cascade en récompense
HOLGUIN, Cuba - On ne se prélasse pas beaucoup en optant pour un voyage de cyclotourisme, mais le jeu en vaut la chandelle.
Martin Smith
Particulièrement quand l'encadrement est de première qualité comme celui mis en place depuis huit ans dans l'Oriente cubain par l'agence Cyclo-Services de Québec.
Le coordonnateur Alfredo, le chauffeur Ernesto, les guides-mécaniciens à motocyclette Victor et Manolito forment une équipe fiable qui rend la vie plus facile et plus agréable à tous les cyclistes.
Les itinéraires ont été pensés pour ne pas éreinter les participants. Il faut en tenir compte puisque le plus gros de la clientèle de ce type de voyage est formé de gens de 45 ans et plus. La moyenne d'âge du groupe de novembre dernier dépassait les 56 ans.
Les cyclotouristes s'installent dans des hôtels très confortables de villes comme Holguin, Bayamo, Santiago de Cuba ou Guantanamo.
Ces hôtels, nommés El Bosque, Sierra Maestra ou San Juan, servent de « camps de base » pendant trois ou quatre jours, selon les cas.
Les circuits routiers ont été façonnés en boucles pour procurer un objectif raisonnable en termes de kilométrage pour l'aller simple (de 35 à 75 kilomètres) tout en permettant aux plus gros rouleurs de se payer des traites de 100 kilomètres et plus à chaque jour.
Les réveils se font tôt pour éviter autant que possible de rouler sous la chaleur de la mi-journée.
Bénédiction des dieux, on n'a jamais besoin de se désâmer pour parcourir les distances prévues car, à quelques exceptions près, la région de l'Oriente présente une surface relativement plane où les faux-plats montants et descendants dominent. À preuve, avec le vent dans le dos, il a été possible de maintenir une vitesse moyenne de tout près de 30 km/h pour couvrir les 65 kilomètres menant de Bayamo à Manzanillo.
Par ailleurs, les paysages étaient assez changeants puisque les parcours menaient de villes à l'intérieur des terres vers des plages du littoral nord telles Guardalavaca, Gibara et Playa Herradura ou vers le sud comme Manzanillo.
Avec une baignade en mer comme récompense en bout de ligne, les derniers coups de pédale étaient souvent plus faciles à donner.
Une des plus belles excursions a mené les cyclotouristes dans un « centre de santé anti-stress» nommé El Salton et situé dans les contreforts de la Sierra Maestra. Un endroit de toute beauté où une cascade haute de plus de trente mètres finit sa course dans un grand bassin où la baignade est délicieuse. Tout autant que le dîner de cochon rôti sur le feu qui nous attendait à l'ombre de grands arbres bordant la rive de ce lieu féerique.
Les cyclistes québécois sont revenus emballés
BAYAMO, Cuba - Les réactions du groupe de cyclotouristes québécois ayant parcouru les routes de l'Oriente cubain, en novembre dernier, ont été unanimement positives.
Martin Smith
Voici quelques-uns de ces commentaires recueillis au terme du voyage:
« Nous voulions visiter Cuba mais pas de la façon habituelle des Québécois qui vont à Varadero, à Cayo Coco ou à Guardalavaca. Nous avons bien fait. Voir ce pays de l'intérieur nous a donné le goût d'en connaître plus sur l'histoire de l'île, de sa colonisation par les Espagnols jusqu'à la révolution de Castro. Nous rapportons des images de paysages magnifiques et de gens très hospitaliers. Nous avons été témoins de toutes leurs privations (nourriture, médicaments, pétrole, véhicules) et avons été surpris de les voir toujours de bonne humeur. Quant au cyclisme comme tel, nous avons apprécié être très bien encadrés, pouvoir rouler selon nos capacités et avoir l'autobus à notre disposition pour pouvoir arrêter de pédaler quand la fatigue se faisait sentir. Mon épouse Denise et moi sommes prêts à recommencer l'expérience, préférablement dans un endroit plus baigné dans l'histoire comme la région de Santiago de Cuba. »
Marcel Hénault, notaire en préretraite, de Saint-Eustache.
« Le cyclotourisme à l'étranger avec un groupe d'une quinzaine de personnes s'est révélé une formule fort intéressante. Pas trop de monde, juste assez pour établir des contacts. Ça ne prend d'ailleurs pas de temps à développer une bonne dynamique de groupe puisque les gens qui choisissent une telle formule de vacances ont des intérêts en commun. Cette première expérience nous a donné l'impression d'entrer en contact avec le Cuba profond, de palper l'âme du pays. Visiter un pays à vélo, c'est tellement différent. Les écoliers crient en choeur sur notre passage, les paysans nous saluent, les gens nous lancent constamment des Hola! On saisit parfaitement le fossé qui existe entre notre super-confort de consommateurs gâtés et leur vie sans artifice axée sur la survie ... »
Alain Lallier, ex-dg du cégep du Vieux-Montréal, résidant de Montréal.
« Le cyclotourisme nous a permis de faire un beau voyage pas cher et très instructif. Au départ, mon épouse Monique et moi n'aimons pas les voyages de tourisme purs, ni les voyages de plage. J'aime voyager tout en faisant quelque chose, à savoir sport, congrès, réunions d'amis ou de famille. À Cuba
la recette était parfaite avec un bon groupe très vivant, du bon rhum et des conversations animées. On doit sacrifier un peu d'autonomie en voyageant en groupe, mais on y gagne avec la disparition de tout souci. Et puis, en plus d'avoir vu un pays sous des coutures que bien peu de touristes québécois connaissent, nous avons vécu des moments magiques lors des dîners dans les paladors, lors d'une réception chez notre guide Victor et lors d'un après-midi passé à la plage de Cayo Saetia. »
- Marcel Lafortune, dentiste en préretraite, résidant de Sainte-Thérèse.
« Nous avons déjà fait des voyages de groupe en randonnée pédestre et en ski alpin mais c'était notre première expérience en vélo. Nous avons trouvé très motivant de pédaler en groupe car ça nous fournissait parfois l'énergie nécessaire pour monter une côte un peu longue. Nous nous sommes toujours sentis en sécurité car nos guides en moto étaient très vigilants et nous ont bien encadrés dans les dédales des rues des villes et villages, tout comme sur les routes un peu plus a achalandées. Nous sommes revenus avec la tête pleine de beaux souvenirs grâce à un contact privilégié avec la nature, grâce aux nombreuses haltes dans des villages où nous étions témoins de la vie au jour le jour des Cubains toujours souriants. Un voyage inoubliable! »
Marceline Archambault, retraitée, résidante d'Oka.
À lire également : Se garder en forme... et voir du pays !
page mise en ligne le 3 janvier 2004 par SVP