Sophie Cousineau
Le Groupe Pro Cycle, fabricant de bicyclettes de Saint-Georges, pédale comme s'il avait une meute de chiens à ses trousses. Et pour cause. En moins de trois ans, il a vu la concurrence chinoise décimer l'industrie américaine du vélo.
Avec un chiffre d'affaires de 85 millions de dollars et un effectif de 450 employés en haute saison, Pro Cycle met tout en oeuvre pour survivre.
Il soigne le design de ses vélos, des modèles haut de gamme qui se trouvent dans les boutiques spécialisées. Il améliore la qualité de ses produits, grâce à son nouvel atelier de peinture. Il brevette toutes ses pièces, deux fois plutôt qu'une. Il investit dans la promotion de ses marques, dont Oryx, Mikado et Rocky Mountain. Il achète des composantes comme les dérailleurs en Asie.
Et pourtant, Pro Cycle n'est pas au bout de ses peines.
« C'est clair que les Chinois apprennent très rapidement, dit son président, Raymond Dutil. Pour nous, c'est une préoccupation constante. Qu'est-cee qu'on peut faire de plus ? »
Aussi, lorsqu'on demande à ce Beauceron issu d'une famille d'entrepreneurs s'il songe à faire assembler des vélos en Chine, il pousse un soupir. « Chaque annnée, on se pose la question. Mais jusqu'à maintenant, on a toujours été capable de dire non. Chaque année, on trouve des trucs, de nouvelles façons de faire. Chaque année, on réussit à s'en sortir. »
Il faut dire que l'industrie canadienne du vélo profite depuis 1992 de mesures antidumping qui restreignent la vente de bicyclettes fabriquées en Chine et à Taiwan. Ce qui n'a pas empêché Victoria Précision, l'un des trois grands fabricants canadiens, qui employait 220 personnes à Montréal, d'être menacé de liquidation depuis l'automne dernier.
Plus important producteur de vélos au monde, la Chine compte plus de 1000 usines qui ont une capacité de production estimée à 70 millions d'unités. Troquant leurs bicyclettes pour des voitures, les Chinois délaissent de plus en plus leur moyen de transport traditionnel. Avec une demande en chute, des millions de bicyclettes menacent d'inonder les marchés d'Europe et des Amériques, comme celui du Canada, où seulement 1,5 million de bicyclettes trouvent preneur.
Mais ces mesures de protection pour les bicyclettes les moins chères, réévaluées tous les cinq ans, sont moindres depuis l'an dernier. Et Raymond Dutil ne s'attend pas à ce que le Tribunal canadien du commerce extérieur les prolonge une troisième fois. « Pro Cycle a quatre ans pour s'en affranchir », dit-il.
page mise en ligne le 26 janvier 2004 par SVP