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30 avril 2005



Cardenas passe pour la capitale cubaine du vélo

Cuba à vélo

Quand l'hiver n'en finit plus de finir dans nos campagnes et que la plupart des routes cyclables restent impraticables, celui qui souhaite entamer sa saison de vélo avec un peu d'avance ne peut guère faire autrement que de mettre plein cap sur le Sud.

Cuba s'impose comme l'un des choix les plus judicieux à cause de sa superficie, qui permet des parcours diversifiés et des conditions de circulation exceptionnelles.

Au-delà de la zone hôtelière

Pour voir le vrai Cuba, il faut franchir la frontière de la zone hotelière de Varadero et, pour l'apprécier pleinement, il vaut mieux le parcourir à vélo

Première sortie : direction Matanzas, la capitale et la plus grande ville de la province du même nom avec 110000 habitants, des installations portuaires, une université, un grand hôpital et une petite cathédrale. La route longe la mer sur de grandes distances, traverse des champs de plantations de sisals et des pâturages, où les aigrettes blanches surveillent les insectes au-dessus de la cuirasse des bêtes à cornes, et traverse quelques rares hameaux, où fleurissent des bougainvilliers violets et des lauriers blancs. Par endroits, des dizaines d'urubus à tête rouge volent à basse altitude au-dessus de terres en friche.

Autres observations notées sur mes bouts de papier : la chaussée se trouve en bien meilleur état que celle de nos routes au printemps ; circulation fluide, même aux abords de l'aéroport international, sans doute à cause de la rareté du matériel roulant et du prix élevé du carburant ; au volant d'un car de touristes, d'un bus, d'une Chevrolet 1952, d'une Lada brinquebalante, d'une rutilante Suzuki, d'un camion de livraison ou d'une moto, le chauffeur cubain roule à fond la caisse, mais probablement, culture de solidarité citoyenne obligeant, il sait garder ses distances et laisse d'ordinaire plus que l'espace réglementaire entre la tôle de son engin et le mollet du cycliste.

À l'entrée de Matanzas, un slogan sur un panneau géant proclame 'Pueblo Laborioso Revolucionario y Culto', que j'achève de traduire, à l'aide de mon Robert & Collins, par 'Une nation laborieuse est révolutionnaire et éclairée', lorsque s'amène un vieil homme. Lunettes rondes, barbe longue et veston de ses anciens dimanches, il marmonne quelques mots dans la langue de Fidel et montre du doigt le creux de sa main. Pas besoin du dictionnaire pour comprendre qu'il veut de l'argent. Le travailleur cubain touche l'équivalent de 50 cents pour une journée de labeur. L'État pourvoit à l'essentiel de ses besoins de première nécessité, mais il semble qu'il en faut plus pour vivre heureux.

Matanzas s'étire en forme de U devant une grande baie (11 km) aux eaux profondes (600 m). Une promenade pour piétons et cyclistes suit la longue avenue jusque dans la vieille ville : peu de promeneurs à cette heure du matin, deux ou trois pêcheurs solitaires tentent leur chance de la rive, deux gamins se débrouillent pour glisser sur une pente en gazon avec des bouts de carton pendant qu'un autre s'élance gauchement sur ses patins à roulettes, un homme et ses trois fils improvisent une partie de baseball devant leur maison ?

Ce dimanche-là, les fidèles sortent de la cathédrale avec des branches de rameau pendant que des hommes s'adonnent à un jeu étonnant sur les toits de quelques maisons. Ils tiennent des pigeons à bout de bras et poussent des cris pour attirer l'attention d'autres pigeons qui virevoltent dans le ciel. Explications d'un badaud : il s'agit d'une course de pigeons à travers différentes villes de l'île. Un vautour guette la scène du haut des airs.

Le retour à l'hôtel sera laborieux, avec un fort vent de face. Le compteur marque 95 kilomètres à l'arrivée, un peu plus que l'objectif prévu. Beaucoup trop, compte tenu des températures nettement au-dessus de la moyenne saisonnière et d'un degré d'humidité beaucoup plus élevé que la normale : le parcours du lendemain sera réduit de moitié et ça vaudra mieux ainsi.

Une route droite comme une barre, dans un décor plutôt moche, où les hautes cheminées des raffineries crachent des fumées à l'odeur de soufre, mène à Cardenas, une ville de 75 000 habitants au sud de Varadero. Façades de maisons défraîchies et rues trouées de nids-de-poule, Cardenas a, malgré tout, un certain charme avec le va-et-vient continuel de ses dizaines de calèches, qui font office de transport public. Le cocher s'arrête ou ralentit pour laisser monter des passagers tant qu'il reste de la place sur les deux bancs qui se font face. Comme partout ailleurs, il y a un El Rapido pour se ravitailler en eau, manger un morceau et passer au bano.

Même si la chaussée est souvent toute déformée, la boucle à l'intérieur des terres, par Camarioca, le surlendemain, vaut largement la peine pour sa paix bucolique. Et l'explication, à la buvette du village, d'un bonhomme au sujet du renforcement récent de la fameuse Résolution 10, interprété au départ comme une directive aux Cubains de se distancier des touristes, vaut toutes les mises au point gouvernementales qui suivirent : en résumé, selon lui, cette directive vise à mettre en garde les camarades, en mission à l'étranger, contre les tentations de glisser sur les pentes savonneuses du capitalisme, ce qui les éloignerait de l'esprit révolutionnaire.

Pédaler à travers palmiers et cactus

Environ 220 kilomètres séparent la station balnéaire de Varadero de celle de Rancho Luna dans la province voisine de Cienfuegos. L'affaire d'un peu plus de trois heures en voiture.

Mélange de sable, de morceaux de coquillages et d'autres rebuts plus ou moins naturels de la mer, la plage de Rancho Luna n'incite pas tellement à la baignade. Ni aux longues promenades. En revanche, les parcours à vélo dans les alentours ne manquent pas d'attraits. Tant en ville qu'à la campagne.

Montées relativement courtes mais abruptes marquent le parcours entre le Rancho Luna et le Jardin Botanica. Créé par un baron du sucre, acheté par l'Université Harvard, qui en fait un centre de recherche tropicale et d'étude de la canne à sucre, en 1912, et repris par l'État après la révolution, le jardin botanique s'étend sur 90 hectares. On peut y admirer, notamment, des centaines de variétés de palmiers et de cactus et des dizaines de sortes de ficus de grande taille.

En prenant bien son temps dans les quelques longues montées jusqu'à Cienfuegos, il faut moins d'une heure pour arriver aux abords de la ville. Une imposante façade, copiée sur le Parthénon d'Athènes, abrite l'un des plus grands cimetières du pays. Des pièces de monnaie jonchent le bitume du chemin d'accès. ' Après avoir porté en terre leur défunt, explique une dame, les gens lancent quelques centavos (cubains, et non pas des convertibles) sur la chaussée afin d'obtenir les faveurs de la Sainte Vierge pour leur disparu. Une tradition, chez nous. Quand il y en a pour la peine, les enfants viennent les ramasser et ils arrivent, quelquefois, à en avoir assez pour s'acheter une glace.

Le chemin le plus simple et le plus intéressant pour se rendre dans le quartier historique de Cienfuegos passe par l'avenue du 5-Septembre, traverse un vaste complexe universitaire hospitalier, contourne un grand stade et débouche, après quelques détours par des petites rues, sur une belle promenade en bord de mer. Au loin, de l'autre côté de la baie, nous pouvons voir une partie des installations portuaires d'où partent les exportations du sucre cubain.

Plus près, en bordure de cette large avenue, apparaissent les premières maisons de caractère ? loin de respecter l'esprit du pouvoir prolétaire. Tel le Palacio del Valle, qu'un prospère homme d'affaires, Aciclio Valle, fit bâtir au début du XXe siècle : 'Un surprenant pot-pourri esthétique, note le guide Gallimard, où se mêlent les styles roman, gothique, byzantin et baroque, le tout présentant un aspect général plutôt mauresque. ' Au lendemain de la révolution, le palais a servi d'école hôtelière avant d'être transformé en un club sélect, accessible, me jure Miriel, de l'agence Cubanacan, au commun des mortels.

Les autres édifices d'intérêt entourent le parc José Marti : le théâtre Tomas Terry, du nom d'un riche baron du sucre vénézuélien installé ici au XIXe siècle ; la cathédrale Notre-Dame de l'Immaculée-Conception, remarquable pour ses vitraux représentant les apôtres ; un ancien collège converti en siège social du gouvernement de la province. Fondée en 1819 par un Français, Louis de Cluet, venu s'installer avec une quarantaine de familles de La Nouvelle-Orléans, la colonie se nommera d'abord Fernandina de Jagua et deviendra, en 1830, Cienfuegos du nom du gouverneur général José Cienfuegos. La forteresse de Jagua se trouve à une vingtaine de kilomètres de la ville, à l'embouchure de la baie et pas loin du Rancho Luna.

REPÈRES
Transport du vélo
Air Transat transporte notre vélo sans frais et ne compte pas son poids dans la limite de 20 kg allouée à chaque passager. Il suffit de le démonter, d'enlever les pédales et la selle et de placer le guidon à la verticale pour le faire entrer dans une boîte, que la plupart des bons marchands de vélos offrent gratuitement, et de bien scotcher. Cubana, la compagnie aérienne cubaine, pratique la même politique. Si on voyage en individuel, il vaut mieux s'assurer que le service de navette entre l'aéroport et l'hôtel sera en mesure de prendre la boîte de vélo, sinon prévoir des frais supplémentaires. Pendant le séjour, moyennant un supplément, on peut toujours mettre son vélo dans la soute des cars interurbains Viazul pour gagner du temps ou surmonter un moment de découragement.

Forfaits et itinéraires
La solution de remplacement à l'équipée en solitaire, c'est le voyage organisé en petit groupe de 15 à 20 personnes. Un des itinéraires classiques commencera, par exemple, à Santiago de Cuba et se terminera, deux semaines plus tard, à La Havane, en passant par la Sierra de la Gran Piedra, Guardalavaca, Camaguey, les montagnes de Topes de Collantes, Trinidad, Santa Clara, la péninsule Zapata, Playa Larga dans la baie des Cochons, un arrêt à La Havane, Soroa, la vallée de Vinales et retour à La Havane. Les participants bénéficient d'un encadrement pendant toute la durée du voyage, pédalent quelques dizaines de kilomètres par jour, montent dans l'autocar de service pour les grandes distances et les montées trop difficiles et n'ont jamais à se soucier de chercher hôtels et restaurants.

L'agence Vélo Québec Voyages propose, pour sa part, des circuits d'une semaine, avec des parcours quotidiens variant de 20 à 90 kilomètres, dans trois régions différentes pendant les mois de février et mars. En milieu rural autour de Pinar del Rio dans l'extrémité ouest de l'île ; dans le centre, entre la mer des Caraïbes et le massif de l'Escambray ; et le long du littoral dans l'Est.

Autre formule pour aller faire du vélo à Cuba : acheter l'un des nombreux forfaits en hôtel, englobant toutes les dépenses de transports aérien et terrestre, d'hébergement et de repas et rayonner à partir là, en combinant les plaisirs du vélo aux agréments de la plage. Pédaler, le matin, parmi les palmiers et les bananiers et faire le farniente, l'après-midi, à l'ombre des cocotiers. Deux stations balnéaires à la mode peuvent servir de bonnes bases d'opération : Varadero, sur la côte nord, et Rancho Luna, sur la côte sud, où les plats et les faux plats alternent avec des pentes plus ou moins douces.

Les prix des forfaits de Vélo Québec tournent autour de 1800 $ et comprennent l'hébergement en petite hôtellerie ainsi que la plupart des repas. Détails sur www.velo.qc,ca/voyages. L'agence Voyage Culture Cuba (www.culturecuba.com) propose un forfait d'une semaine, dont le montant est d'environ 1600 $, selon la date de départ, par personne, sur la base d'une chambre double. Le forfait comprend l'aller-retour Montréal/Cienfuegos, avec Cubana, quatre nuits au Club Amigo Varadero, un hôtel 3 étoiles, trois nuits au Rancho Luna, un 2 1/2 étoiles, tous les repas et toutes les boissons locales ainsi que les transferts.

Monnaie
Peso convertible, qui vaut un peu plus que le dollar américain. Éviter de faire le change avec des dollars américains puisqu'on applique systématiquement une commission de 10 %. On peut facilement se procurer des pesos convertibles avec des dollars canadiens, sans frais.

Taxes d'aéroport de 25 pesos convertibles avant de s'embarquer pour le vol de retour, payables uniquement en pesos convertibles.

Les frais de transport ont été payés par Air Transat.


page mise en ligne par SVP

Guy Maguire, webmestre, SVPsports@sympatico.ca
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