les "chroniques vélo" |
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23 juin 1997
La tourterelle triste
Claude Landry n'a pas attendu la «vague» pour se mettre au vélo. En fait, à 62 ans, du vélo, il ne se souvient pas de ne pas en avoir fait. Été comme hiver.
Le Tour de l'île ? Il était du premier ! Pas en 1985, quand a débuté l'actuelle randonnée populaire de masse. Plutôt vers 1970. Il en était même un des organisateurs. Ça s'appelait la «Ronde de Montréal» et ça n'avait pas grand-chose à voir avec l'actuel Tour de l'île.
«On partait du pont Viau et on se dirigeait vers l'ouest : Sainte-Anne-de-Bellevue, le lac Saint-Louis, on remontait par LaSalle, le Vieux-Port, le bout de l'île, l'hippodrome et on revenait au pont Viau par le boulevard Gouin. Quatre-vingts milles (130 kilomètres), c'était de la folie furieuse.»
Cet ancêtre du Tour de l'île n'attirait pas les foules. «On devait être 18, 20 ... peut-être 25. Il y a deux semaines (lors du 13e Tour de l'île), on était 45 000 !»
À soixante et quelques kilomètres, l'actuel Tour de l'ile n'est d'ailleurs qu'un «demi-tour». Aussi, l'an dernier, M. Landry s'est-il permis de l'enfiler deux fois.
«Ma femme, Denise, n'avait pas le goût de le faire cette année-là. Alors je suis parti seul, tôt le matin. Quand je suis rentré, vers 11 h, elle avait changé d'idée ... Alors je suis reparti avec elle.»
Il y a 25 ans, un adulte sur un vélo, ça ne faisait pas très sérieux. Et Claude Landry se souvient de s'être fait klaxonner, montrer du poing et même lancer des bouteilles par des automobilistes.
«Un de mes propres frères riait de nous !»
- Et aujourd'hui ?
- Il s'est mis au vélo, lui aussi.
L'ex-acheteur à la Continental Can avoue tout de même qu'il n'aurait jamais pu prévoir l'expansion que prendrait le vélo.
- Quand vous êtes-vous rendu compte que ça démarrait pour de vrai ?
- Ça s'est fait graduellement. Mais au début des années 80, c'était parti. À l'époque, je me souviens de samedis où il fallait faire la queue à la porte du magasin de vélos Dumoulin, rue Villeray, tant il y avait du monde. Tu rentrais pas !
Il y a huit ans, est arrivé à M. Landry ce dont rêvent à coup sûr de nombreux cyclistes - et sans doute aussi beaucoup de simples mortels : une généreuse offre de retraite anticipée.
«J'ai accepté et je n'ai pas eu une seconde pour le regretter, nous dit-il en empruntant la piste cyclable du boulevard Gouin sur son Gitane Tour de France, un bon vieux «10 vitesses» payé 325$ il y a 25 ans.
La semaine, comme sa femme travaille encore - elle est prof d'éducation physique dans une école primaire -, il se balade principalement en ville et autour. Mais les week-ends, avec Denise, il prend le bord : Estrie, Outaouais ... «Ça irait plus vite de nommer les places où on n'est pas allés.»
Nous lui avions demandé de nous montrer un de ses circuits préférés. Il nous a amenés au parc régional du Bois-de-Liesse, le long du boulevard Gouin, à Pierrefonds.
Pas le circuit idéal pour un entraînement sérieux. Mais c'est à côté de chez lui (il habite Ahuntsic), et la récompense arrive au bout d'une douzaine de kilomètres : le parc du Bois-de-Liesse, la nature à deux pas de la ville.
L'avantage, c'est qu'il peut aussi continuer à rouler tant que le coeur lui en dit. Vers l'ouest, jusqu'au parc régional du Cap-Saint-Jacques, ou vers l'est, jusqu'au parc régional de Rivière-des-Prairies. Ou mieux encore, il peut faire le tour complet de l'île, 130 km, comme dans les années 70. Et cette fois, sans se faire écoeurer par les automobilistes.
«À vélo, tous tes sens sont informés, m'a-t-il expliqué en traversant le parc régional du Bois-de-Saraguay : ton odorat, ton ouie, ta vue ... en plus de l'air qui te caresse le corps.»
Arrivé au Bois-de-Liesse, il se penchera au-dessus d'un petit pont de bois pour me montrer un barrage de castors. Puis, il me demandera : «Entends-tu ce chant, c'est la tourterelle triste ?»
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