les "chroniques vélo"
de Paul Roy

28 juillet 1997

L'achat raté du vélo d'occasion de rêve

Christiane savait ce qu'elle voulait : «Un vélo d'occasion pour de petites randonnées en ville et des courses. Je n'ai pas besoin de bien des vitesses. Mais le vélo devra être confortable - je ne veux pas être toute recroquevillée. Et léger, j'habite au troisième.»

- Budget ?
- Autour de 150$. Ah oui, et je veux un vélo de femme, pour pouvoir porter des jupes.
- Ton choix d'un vélo d'occasion est-il philosophique ? Es-tu allergique aux vélos neufs ... d'un coup qu'on en trouverait un pas cher ?
- Non, pour moi c'est strictement une question de budget.

J'ai prévenu Christiane, une psychologue de 34 ans, qu'une de ses exigences serait difficile à satisfaire : le poids. Les vélos légers sont en alliage. Ou encore en aluminium, en carbone, en titanium. Cher ? Plus que 150$ en tout cas ... Ça prendrait toute une occasion !

J'avais noté quelques adresses, nous sommes partis. Premier arrêt : la boutique Sport aux Puces, 1153, avenue du Mont-Royal Est. Mauvais départ : plus un seul vélo d'occasion, rien que du neuf à des centaines de dollars ... de trop ! «Notre saison vélo est pas mal finie, on est rendus au hockey», nous dit le gérant Martin Lavigne.

Mais la journée est jeune. Alors, traversons la rue. Chez Sport Plus (le Recycleur), 1308 avenue du Mont-Royal Est, Sylvain Lalonde, le proprio, n'a lui aussi que du neuf à nous proposer. Nous examinons un moment un beau Peugeot Campus flambant neuf à ... 309$. Trop cher.

M. Lalonde, fort gentil, nous suggère une visite chez SOS-Vélo, une entreprise de l'est de la ville qui extirpe des jeunes de l'aide sociale en leur faisant retaper de vieux vélos. Nous irons. Mais avant, nous nous arrêterons chez Garantie Bicycle, au 901, rue Marie-Anne Est.

Là, nous en trouvons, des usagés. Une bonne quinzaine, dont cinq ou six vélos d'enfants. Il y a un Bianchi hybride qui semble pas mal, mais c'est un vélo d'homme et il coûte 300$ (taxes comprises). Quelques vélos de femmes, autour de 110$, mais trop petits pour Christiane, qui fait 5'8".

- Et ces bicycles-là ?

Nous venons d'apercevoir une huitaine de vélos neufs, dans le fond de la pièce. Des Leader à six vitesses de l'an dernier : 165$, taxes comprises. Ça semble être un bon deal. Dans le lot, il y en a deux de femme. Mais encore trop petits. Un vélo d'homme ? Christiane hésite. On sort.

Dans la salle de montre de SOS-Vélo, au 2085, rue Bennett, à l'est du marché Maisonneuve, on est impressionnés par la quantité de vélos. Il doit bien y en avoir une cinquantaine. Des usagés, de 45$ à 75$, et des «Écovélo» de 129$ à 289$. Les plus chers, ceux à 289$, sont des «Écovélo plus». Ce sont des cadres et fourches usagés, complètement rafistolés et repeints, auxquels on a greffé des pièces (jantes, pneus, guidons, pédaliers, chaînes, dérailleurs, freins ...) flambant neuves et de qualité convenable.

SOS-Vélo (251-8803) est une vraie petite usine où les stagiaires (18 à la fois) passent six mois - au salaire minimum - à apprendre les rudiments d'un métier (réparer, fabriquer et vendre des vélos) et quelques principes de vie en société (louer un appartement, administrer un budget).

Et les vélos ? Christiane en a essayé quelques-uns (entre 75$ et 129$) qu'elle n'a pas aimés. Inconfortables, des vitesses qui passent mal, un cognement ...

Quant aux «Écovélo plus», ils nous sont apparus impeccables avec leurs jantes en alliage et leurs vitesses indexées. Mais trop cher pour notre budget.

En rentrant, nous arrêterons chez Gene Vélo Sport, 3444, rue Ontario Est. Là aussi on nous exhibe quelques dizaines de vélos d'occasion. Mais aucun ne plaît à Christiane, qui se met à examiner les neufs. La voici assise sur un Minelli hybride de femme. «Très confortable, exactement ce qu'il me faut. Et plutôt joli.» Elle calcule : «250$ plus les taxes, ça fait pas loin de 300$...»

On n'en sort pas. Christiane rentrera chez elle sans vélo, la tête pleine d'images de dérailleurs, de jantes et de pédaliers. «Je vais décanter tout ça», m'a-t-elle dit.

De toute évidence, elle n'a pas aimé les vélos à 100$ qu'elle a vus. Et elle ne semble pas avoir suffisamment le goût de faire du vélo pour s'en payer un plus cher. Ce sont des choses qui arrivent.

Ce qui ne veut pas dire qu'un cycliste moins exigeant - ou plus enthousiaste - n'aurait pas eu plus de succès qu'elle sur le marché de l'occasion. Chantal, qui m'avait donné l'adresse de Gene Vélo Sport (rue Ontario), y a récemment acheté deux Peugeot d'occasion - pour sa fille Naomie et elle - dont elle se dit satisfaite.

Si vous avez le goût de tâter le marché du vélo d'occasion, sachez que toutes les boutiques que nous avons visitées offrent des garanties variant de un à trois mais (chez SOS-Vélo, on offre même jusqu'à un an, pièces et main-d'oeuvre !). Et qu'on trouve encore des vélos d'occasion à la fin de juillet, mais pas autant qu'en avril au mai.

Le premier samedi d'avril, d'ailleurs, le Vélo Club de Brossard organise depuis plusieurs années une mégavente de vélos d'occasion à la polyvalente de l'endroit (on s'informe en temps et lieu à 1'hÔtel de ville). Vous pouvez y apporter le vélo que vous voulez vendre ou y acheter celui dont vous avez besoin. Le Vélo Club conserve 15% du montant de la transaction pour financer ses activités.

«Cette année, on a ainsi vendu 800 vélos, nous a dit un organisateur. En une seule journée !»

Un dernier truc : au prochain party de famille, profitez de l'affluence autour du BBQ au de la piscine hors terre pour demander à la ronde si quelqu'un n'aurait pas une vieille bécane dont il (ou elle) voudrait se défaire. L'an passé, j'ai ainsi hérité d'un Supercycle en fort bon état, qui m'a servi de vélo de ville - merci encore, Claude - jusqu'à ce qu'on me le vole cet été.

Dommage, il était d'un grand confort. Mon amie Christiane l'aurait peut-être aimé. Ah non, c'était un vélo de gars...


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