Paul Roy, cycliste |
---|
L'émotion était toute là
Paul Roy
Pierrette Marleau et 2000 autres cyclistes ont fait une entrée triomphale dans le parc régional de Longueuil, hier après-midi.
Ils arrivaient de Saint-Lambert, tout près. Mais ils avaient fait un détour de huit jours par Saint-Jean, Granby, Magog, Lennoxville, Drummondville et Saint-Hyacinthe. Entre 700 et 800 kilomètres de vélo, selon qu'ils avaient pédalé les parcours alternatifs ou non.
Des centaines et des centaines de parents, d'amis et de quidams avaient fait une haie, pour les accueillir. Les «Bravo !» et les «Vous l'avez fait !» fusaient. On s'embrassait à bouche que veux-tu.
«Quand je suis arrivée, j'avais une grosse boule dans la gorge, disait Mme Marleau, une résidente de Valleyfield de 45 ans, se remettant de ses émotions. J'étais fière de moi, fière des autres, on s'était cotoyés pendant une semaine, on avait monté nos tentes ensemble, démonté nos tentes ensemble...»
Ainsi a pris fin hier la deuxième édition du Grand Tour, bébé du Tour de l'île.
Et Suzanne Lareau, pdg des deux événements, parlait d'un grand succès, opinion qui semblait partagée par tous les participants à qui l'on s'adressait. Le défi était pourtant de taille : à sa première année, l'an dernier, le Grand Tour avait déjà été qualifié par tous de grand succès : température exceptionnelle, organisation sans faille, etc.
Cette année, on «grossissait», passant de 1150 à un peu plus de 2000 participants. Et on ne pouvait espérer une température parfaite pour une deuxième fois d'affilée... Ce qui devait arriver arriva : samedi dernier, à Saint-Jean, les tentes furent montées sous un déluge. Et le mauvais temps dura jusqu'au lendemain après-midi, alors que nous approchions de Granby. Dur début.
Et puis le nombre : 2000 personnes à loger, à nourir et à encadrer durant huit jours, c'est plus difficile. Cet été, le Grand Tour a connu ses premières vraies files d'attente. «Pour l'équipe, cette édition a été beaucoup plus éprouvante que la précédente», confirmait d'ailleurs Suzanne Lareau.
Aussi, dit-elle, le troisième Grand Tour, à l'été de 1996, n'accueillera-t-il lui aussi que 2000 participants. Et cela, même si les 2000 places de cette année se sont envolées en trois semaines. Organiser deux Grands Tours, alors ? Pour Mme Lareau, il n'en est pas question. Elle projette plutôt de lancer de nouveaux événements cyclistes. Ainsi, dès l'an prochain, il y aura un tour destiné aux familles.
Elle songe aussi à une randonnée au Vermont, à raison d'environ 80 kilomètres par jour. «Chose certaine, dit-elle, les gens veulent faire du vélo, la demande est là !»
Mais le meilleur baromètre pour mesurer le succès de ce deuxième Grand Tour, c'était d'observer ses participants tout au long de la semaine qui vient de s'écouler. Les gens étaient contents. Dans les côtes, dans le vent, le soir au Bistrot du tour, même dans les files d'attente à la cafétéria. Des abandons ? «Très difficile à estimer, répond Suzanne Lareau. Ceux qui quittent ne viennent pas nécessairement nous le dire. Notre seule façon de mesurer, c'est par le nombre de repas servis. Et cela nous indiquerait qu'entre 50 et 100 personnes auraient quitté en cours de semaine.»
Enrica Ponzini et Maurice Sylvestre ne se connaissent pas. Mais ils ont tout de même quelques points en commun : elle est originaire du lac Majeur, dans le nord de l'Italie, il habite Sainte-Adèle, au nord de Montréal. Mais surtout, à 67 et 79 ans, ils sont respectivement doyenne et doyen du Grand Tour pour une deuxième année d'affilée.
Couturière pour le cinéma et la télévision, Mme Ponzini tente depuis deux ans de prendre sa retraite, mais chez elle, le téléphone continue de sonner. Cet été, on lui a demandé de travailler aux costumes des Grands procès et de Zap. «Je suis à l'entraînement», a-t-elle répondu. Son entraînement comprenait de fréquentes sorties de sa maison du Nouveau-Rosemont jusqu'à l'extrême ouest de l'île, Cap Saint-Jacques, Sainte-Anne-de-Bellevue. Et retour, bien entendu. Quatre-vingts, 100, 105 kilomètres. Seule. «L'an prochain, dit-elle, je compte aller m'entraîner d'avantage au Mont-Royal. J'avais un peu de difficulté dans les côtes, cette semaine.»
Tout comme Mme Ponzini a fait le tour avec sa fille, Sonia, cette année, Maurice Sylvestre l'a fait avec son fils, Yves. Mais il a roulé seul la plupart du temps. «Il faut que je sois seul, explique-t-il. Comme ça, si ça me dit d'arrêter, j'arrête. Et je ne dérange personne.
- Mais vous finissez par arriver...
- Toujours.
M. Sylvestre, qui a été barman toute sa vie, continue de faire du ski de fond, du ski alpin, et de fendre son bois.
- Et j'ai toujours pris mes trois ou quatre bières avant de souper.
- La belle vie ?
- Me semble que oui.
Fera-t-il le Grand Tour l'an prochain, à 80 ans. «Ça dépendra de ma santé. Des fois, ça diminue vite, à un certain âge...»
- Allez-vous trouver ça dur, de devoir ralentir, arrêter ?
- Chaque fois que cette pensée me vient, je la chasse.
Où ira le Grand Tour, l'an prochain ? Ses organisateurs disent l'ignorer totalement. Chose certaine, il ne sera calqué sur aucun des deux premiers. Pour savoir quand et comment s'inscrire, il faudra composer le 521-TOUR. Mais juste après les Fêtes. Joyeux Noël !