Paul Roy, cycliste

5 août 1996

La mairesse

Paul Roy

Drummondville
Elle s'est avancée à notre table et nous a salués avec beaucoup de gentillesse. Sur sa blouse, une carte avec son nom écrit à la main : Monique Laplante. Et d'ajouter : «Je suis la mairesse de Sainte-Christine.»

Nous étions à la halte-dîner. Assis à des tables de pique-nique ou sur des ballots de foin, nous examinions le contenu des sacs qu'on venait de nous remettre : sandwich au jambon, salade de chou, légumes crus, banane, pomme, gâteau... Ça prend des calories pour en brûler !

Madame la mairesse est allée droit au but : «Nous cherchons des familles pour garder notre école ouverte et nous tentons d'attirer des jeunes couples. »

- Vous avez de la place ?
- Nous nous plaisons à décrire Sainte-Christine comme «la petite municipalité aux grands espaces». Nos taxes sont basses, nous sommes proches de toutes les routes importantes... Mais pourtant, les automobilistes qui empruntent ces routes nous demandent souvent : «C'est où Sainte-Christine ?»

Eh bien, c'est quelque part entre Granby, Drummondville, Saint- Hyacinthe et Sherbrooke.

- Et où peut-on travailler quand on vit à Sainte-Christine ?
- À Valcourt, chez Bombardier, à Acton Vaie, chez Peerless, à Roxton, chez Camoplast, à Durham Sud, où on fabrique des cercueils...
- Et le taux de criminalité ?
- (Elle rit) Notre population de 800 habitants est à 99 % rurale !

Mme Laplante et son mari sont eux-mêmes agriculteurs. Ils élèvent une trentaine de vaches laitières. «Mon mari a 125 arpents de terre à foin, cette semaine, ce n'est pas l'ouvrage qui manque.»

Journée collante, hier, au Grand Tour. Mais quelques bosses - modestes toutefois - sont apparues sur le parcours, pour la plus grande joie des amateurs.

Le coureur cycliste Yannick Cojan, qui participe à son deuxième Grand Tour avec sa blonde Kathleen Bernier, a observé une femme descendre très dignement de vélo au haut d'une de ces bosses, hier matin, et s'écrier : «La maudite vieille crisse ! Je l'ai montée !»

Ce parcours, donc, à mené les 1900 cyclistes de Granby à Drummondville en passant par Roxton Pond, Roxton Falls, Sainte- Christine et Lefebvre. Le parcours alternatif (107 kilomètres) passait par L'Avenir, village connu par les adeptes du bronzage intégral pour son club de nudistes.

C'est entre autres à L'Avenir, il y a une douzaine d'années, qu'avait eu lieu le premier mariage nudiste au Québec. Peut-ètre même au Canada. Au monde ?

Les futurs époux exigeant une cérémonie religieuse, on avait importé un prêtre des États-Unis. Il faisait exceptionnellement froid ce jour-là, mais les mariés n'avaient pas hésité à se pointer devant l'autel nus comme des vers. Les invités n'avaient pas eu ce courage et s'étaient habillés de vêtements chauds.

Quelques marchands de vélo participent au Grand Tour. Mais contrairement à ce que certains pourraient penser, ce ne sont pas tous des Pascal Richard (vainqueur de la course sur route à Atlanta).

«Je peux difficilement rouler plus de 1000 kilomètres par été, s'explique Yvon Bouchard, propriétaire du magasin Le Vélociste, rue Papineau. Ces temps-ci, on est ouvert sept jours par semaine !»

Même son de cloche de Pierre Piché, proprio de Garantie Bicycle, rue Marie-Anne : «Chez-nous, c'est l'été que ça se passe...»

Ont également été aperçus à vélo, au Grand Tour, André Primeau, propriétaire d'un magasin de vélos qui porte son nom, à Brossard, et son frère Pierre, président du regroupement de marchands de vélos AVP.

Pour la deuxième année, l'atelier mécanique, qui se déplace d'étape en étape, est prêté par l'ex-coureur cycliste Gervais Rioux, dont la boutique, Cycles Gervais Rioux, a pignon boulevard Saint-Laurent.

Vu, un peu passé L'Avenir, un troupeau de vaches couleur du sable de l'Ile-du-Prince-Édouard. Deux ou trois patates avec ça ?

Aujourd'hui, Drummondville-Trois-Rivières : 96 kilomètres. Les «communisses», que feu Maurice Duplessis avait accusés d'avoir fait tomber le pont de Trois-Rivières, risquent de se retourner dans leurs tombes en voyant les cyclistes bouder le pont (reconstruit depuis) et traverser le Saint-Laurent par bateau. Les organisateurs n'ont sans doute pas voulu prendre de chances.