6 décembre 2001

La double médaillée olympique s'est installée dans les Cantons de l'Est

Clara Hughes, une athlète exceptionnelle


photo : PC

Clara Hughes est déjà considérée comme une athlète exceptionnelle, mais tout porte à croire qu'elle le deviendra encore plus à Salt Lake City.

Pourtant, bien peu de Québécois et de Canadiens connaissent cette grande rousse qui a décroché deux médailles de bronze en cyclisme sur route lors des Jeux olympiques d'Atlanta.

Faut dire que Clara ne recherche pas l'attention médiatique. Elle se contente de savourer sa montée vers l'atteinte de son plein potentiel sportif, mais sa force tranquille impose le respect dans tous les groupes où elle passe.

Boucle québécoise bouclée
Clara est née à Winnipeg, mais sa mère Maureen et sa grand-mère maternelle Dorothy Lester sont toutes deux nées et ont été élevées au Québec. La boucle a été bouclée l'année dernière quand Clara et son mari américain Peter Guzman ont choisi de s'établir au Québec, plus précisément à Glen Sutton, dans les Cantons de l'Est.

«Je suis tombée amoureuse de la vallée de la Missisquoi quand j'ai couru le Grand Prix international du Québec avec Lyne (Bessette)», a-t-elle expliqué, hier, lors d'une entrevue téléphonique depuis Calgary.

Hughes se trouve actuellement dans la métropole albertaine pour participer ce week-end à une Coupe du monde de patinage de vitesse longue piste.

Cette étonnante et très polyvalente athlète a en effet délaissé le cyclisme sur route pour revenir à ses premières amours.

«J'ai eu la piqûre pour les sports et les Olympiques en voyant patiner Gaétan Boucher lors des Jeux de Calgary», raconte celle qui avait 15 ans à l'époque.

L'inspiration a été si forte et la motive encore tellement qu'à moins de catastrophe majeure, cette athlète, maintenant âgée de 29 ans, deviendra à Salt Lake City la troisième femme et la huitième athlète (tous sexes confondus) du Canada à avoir participé à une édition des Jeux d'été et d'hiver.

Un groupe très sélect
Hughes pourrait occuper une place encore plus spéciale au sein de ce groupe déjà très sélect en devenant la seule et unique athlète du Canada à revendiquer un podium dans chaque volet des Jeux olympiques.

«Clara a grandement amélioré sa technique cette année et peut légitimement aspirer à une médaille en février prochain », affirme Robert Bolduc, directeur haute performance à l'Association canadienne de patinage de vitesse.

Hughes en a fait la preuve lors d'une Coupe du monde tenue à La Haye, aux Pays-Bas, où elle a été la meilleure Canadienne au 5000m avec un chrono la plaçant au 5e rang, à huit secondes de la gagnante allemande Anni Friesinger, détentrice du record mondial du 1500 mètres.

Après Salt Lake City, Clara Hughes n'a pas l'intention de s'asseoir ensuite sur ses lauriers. Dès l'été prochain, elle se met au cyclisme sur piste au vélodrome de Bromont. Grâce aux judicieux conseils de l'entraîneur national Éric Van Den Eynde, elle entend grimper rapidement les échelons de la hiérarchie mondiale de cette discipline afin de se qualifier en vue des Jeux d'Athènes en 2006.

«Pour moi, le rêve olympique est fait de valeurs incomparables, explique-t-elle. J'ai été inspirée par un athlète en 1988 et ma vie en a été changée. Mon souhait le plus cher est de servir à mon tour d'inspiration à des jeunes.»

À bâtons rompus avec Clara Hughes

« Comment s'est faite la transition du cyclisme vers le patinage de vitesse?
«Après les Jeux de Sydney, au mois de novembre plus précisément, je suis déménagée à Calgary pour pouvoir m'entraîner à l'anneau de glace. Le ciel a été bon pour moi en mettant sur ma route un professeur extraordinaire, la Chinoise Xuili Wang, une technicienne de première classe. Elle m'a permis de réapprendre la technique très vite, mais aussi doucement. Il me reste certains muscles précis à faire travailler plus intensément. Et j'apprécie énormément les nouveaux patins Klap, car ils sont vraiment faits pour des gens puissants comme moi ou comme Catriona LeMay-Doan, par exemple. Je pense que tout progresse bien, comme le prouve ma performance de la fin de novembre aux Pays-Bas.»

Pourquoi le patinage de vitesse?
«Pendant mes dix années de cyclisme, j'ai toujours su que je retournerais au patin. Ce sport m'a toujours fascinée. Aucun autre ne permet à l'être humain d'aller aussi vite sans l'aide d'une machine. C'est un mouvement tellement pur et efficace ! Regardez bien un patineur d'élite: tout semble se faire avec une facilité déconcertante, mais la technique derrière est impressionnante. J'aime bien l'idée de recherche de la technique parfaite.»

Pourquoi continuer tous les sacrifices inhérents à la vie d'athlète d'élite ?
«Mon plus grand sacrifice à l'heure actuelle est de devoir être à Calgary dans une situation d'entraînement plutôt que dans notre maison de Glen Sutton, cette maison que j'adore tellement. Pour ce qui est du sport, je sens que je n'ai pas le choix, car je ne crois pas avoir atteint mon plein potentiel en tant qu'athlète. Le cyclisme m'a laissé sur ma faim. Je suis convaincue que le patinage de vitesse m'amènera plus loin, plus haut, plus vite que tout autre sport. C'est tellement ça ma vie que j'ai appelé les gens de chez Saturn pour leur dire que je ne courrais pas au sein de leur équipe professionnelle sur route la saison prochaine. Je suis complètement fauchée, mais ça ne me dérange pas. Je suis dans un tel état de grâce que j'ai l'impression d'en être à mes tout débuts en tant qu'athlète.

Le temps était-il venu de trouver des sports où s'exprimer complètement comme individu?
«L'an dernier j'ai commencé à sentir que le temps de vivre une transition était arrivé. J'avais enfin la maturité nécessaire pour porter la pression de la réussite toute seule. La route, avec ses stratégies d'équipe, m'a appris énormément, mais ne faisait plus battre mon coeur. Mais je n'avais qu'à penser à la piste et aux Jeux du Commonwealth pour être emballée. Même chose pour la longue piste. La saison dernière, à la fin d'une épreuve, j'avais les jambes tellement mortes que j'étais assise sur la glace, incapable de me lever. J'avais tout donné. J'étais heureuse sans bon sens...»

Qu'est-ce qui te fait tellement vibrer dans les Olympiques?
«J'ai façonné toute ma vie en fonction du sport et de cet objectif suprême que sont les Jeux olympiques. J'ai pris des risques, mais j'ai mené une vie fantastique. Je crois être la personne la plus chanceuse de la Terre. J'ai parfois l'impression d'être continuellement en état de grâce.»

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Autres cyclistes ayant participé aux Jeux d'été et d'hiver
Robert Boucher, Colombie-Britannique
Mexico 1968, cyclisme
Grenoble 1968, patinage de vitesse, longue piste

Pierre Harvey, Québec
Montréal 1976, cyclisme
Los Angeles 1984, cyclisme
Calgary 1988, ski de fond

Alain Masson, Québec
Los Angeles 1984, cyclisme
Calgary 1988, ski de fond
Albertville 1992, ski de fond


page mise en ligne le 6 décembre 2001 par SVP

Guy Maguire, webmestre, SVPsports@sympatico.ca