Biographie
"Dès l'enfance, vivant à Paris, où ma mère me conduisait souvent au cinéma, j'étais fasciné par ce rayon lumineux depuis lequel des gens, qui me semblaient immortels, plongeaient sur l'écran. Vers 14 ans, j'ai pris conscience que j'aimais amuser mes petits camarades, appréciant d'être regardé. A 16 ans, je me voyais en haut de l'affiche. A cet âge, on rêve de gloire. Mais quand on apprend le métier de comédien, on s'aperçoit que ce n'est pas le plus important. La passion intérieure se découvre au fur et à mesure que l'âge avance." (Le Républicain Lorrain, décembre 2001) |
Né le 21 décembre 1936 dans un milieu modeste, Henri Guybet réalise son rêve d'adolescent et devient comédien et humoriste. Il fait des numéros de "fantaisiste" dans les cabarets et les music-halls, tient des petits rôles au théâtre et à la télévision, tourne dans des publicités, etc. En 1968, il se joint à une petite bande d'illuminés sans le sou, mais riches en talent et en culot, qui veut fonder son propre café-théâtre. Avec Romain Bouteille à leur tête, ils transforment une ancienne petite fabrique de ventilateurs en salle de spectacle. Ce sera le "Café de la Gare" qui ouvrira ses portes en juin 1969 après plus d'une année de rêves et de travaux acharnés. "Personne ne nous engageait et on crevait de jouer. Tels des moines cisterciens qui élevaient leurs couvents, nous sommes devenus des bâtisseurs. Des acteurs cisterciens" , confiera Henri Guybet plus de trente ans plus tard à un journaliste de L'Express. |
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Le succès ne se fait pas longtemps attendre pour cette troupe pas comme les autres et dont l'esprit contestataire, excentrique et libertaire correspond parfaitement à celui de l'époque : "On s'est offert le luxe de réinventer ce que les professeurs nous avaient appris", ajoutera Guybet dans la même interview. Au Café de la Gare, la folie pure, l'anarchie et la créativité sont en vedettes tous les soirs. Quatre des membres de la troupe sont bientôt très sollicités par le cinéma : Coluche, Miou-Miou, Patrick Dewaere et Henri Guybet. Dès 1970, Henri Guybet enchaîne les petits rôles dans des films "commerciaux" comme La Cavale, Les Mariés de l'An II, Elle court, elle court la banlieue, Quelques messieurs trop tranquilles... Avec le reste de la "Bande à Bouteille" originale, il apparaît aussi dans deux œuvres très peu conventionnelles : L'An 01 et Themroc, un film très insolite dont les dialogues ne contiennent aucun mot recensé dans le Larousse de la langue française. Guybet y tient trois rôles différents et prononce ses répliques absurdes de façon très convaincue: "Abetakamounzouko karamishtan!" dit-il avec consternation au sujet des frasques spectaculaires de Themroc (Michel Piccoli). |
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Mais c'est avec Les aventures de Rabbi Jacob (Gérard Oury, 1973), qu'il devient une vraie vedette de cinéma. Il y incarne Salomon, le sympathique chauffeur de l'irascible Victor Pivert."Je n'en revenais pas. On m'avait dit que de Funès faisait couper les scènes. Et j'ai découvert un grand professionnel avec lequel il était infiniment agréable de travailler. Il renvoyait la balle, il jouait vraiment avec ses partenaires." (Louis de Funès, une légende).Henri Guybet est rapidement catalogué comme étant un "spécialiste des rôles de composition dans les films comiques français". En 1974, il tourne dans quelques comédies aussi obscures que médiocres ( O.K. Patron, Y a un os dans la moulinette, Les démerdards) et dans deux grands succès avec Pierre Richard : La moutarde me monte au nez et l'excellent Le retour du grand blond. |
En 1975, il joue un rôle "sérieux" dans un film policier de Jacques Deray, Flic Story. Son personnage, l'inspecteur Hidoine, travaille en étroite collaboration avec le héros, Roger Borniche (Alain Delon). Malheureusement, le réalisme frappant de son interprétation et le succès du film ne suffisent pas à sortir Henri Guybet du "secteur" comique.... Il dira en 1977 : "Je suis un comédien ! Et un comédien, c'est comme un instrument de musique, il n'est pas fait pour ne jouer que des polkas. Un tango ou un bon slow, il doit pouvoir le jouer aussi ! L'ennui, c'est qu'on ne me réclame que pour des polkas... Enfin presque, j'ai tourné un truc différent dans Flic Story et cela m'a fait très plaisir de travailler avec Delon." |
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De 1975 à 1978, il tourne dans plusieurs comédies à succès dont : Pas de Problème et On aura tout vu de Georges Lautner et, surtout, dans deux films de Robert Lamoureux : On a retrouvé la Septième Compagnie et La Septième Compagnie au clair de lune. Désormais, le public français l'associera d'abord et avant tout à ce grand idiot de Tassin, qui, dans la vie civile, "tuait les beux à l'abattoir de Nice" et ne pense qu'à manger..."Je n'en ai pas honte, affirme-t-il en 1977. Les deux films que j'ai tournés avec Lautner étaient réellement drôles et les deux avec Lamoureux ne sont pas des "caleçonnades" et avaient au moins le mérite d'être bien ficelés, sérieusement fabriqués. Simplement, j'ai désormais envie de faire la bascule. De passer du "gros comique" à des films drôles, mais tendres... J'adore faire rire, je tiens à continuer à le faire, mais dans un registre différent." |
Parallèlement à sa carrière au cinéma, il travaille beaucoup au théâtre, notamment au Café de la Gare où il créera au fil des ans une quinzaine de spectacles. L'un d'eux, Une pitoyable mascarade (1977), qui met aussi en vedette Patrick Dewaere, raconte le massacre de la nation indienne dans "une adaptation idéologique et historique très, très libre". "D'accord, j'ai toujours su faire rire. Et forcément les metteurs en scène ont eu envie d'exploiter ce don au cinéma. [...] Mais ne vous y fiez pas ! Cela ne m'empêche pas de jouer sur bien d'autres registres au théâtre." (1981) |
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Avec Maureen Kerwin dans Le
Pion
En 1978, le réalisateur Christian Gion fait un très beau cadeau à celui qui est son comédien préféré depuis qu'il l'a découvert au Café de la Gare : il lui donne le premier rôle dans Le Pion. Sans être un chef-d'œuvre, ce sera le "film drôle, mais tendre" dont Henri Guybet rêvait depuis longtemps... Gion a même écrit le personnage de Barabi en pensant à lui! Pendant le tournage, Guybet confie à France-Soir : "Il y a longtemps que j'avais envie de faire ça, de jouer comme dans les comédies américaines. Mais je croyais que c'était impossible." À un autre journal : "J'aime beaucoup Barabi, personnage timide, sensible et presque naïf, ce qui me change de mes nombreux rôles de méchants [ à la télévision ]."Il avoue être impressionné par la leçon de "spontanéité naturelle" que leur donnent les enfants : "Ils jouent comme on joue à la dînette."Tourner avec des enfants ne l'intimide pas ? lui demande un troisième journaliste : "Que si. J'avais même tellement le trac que j'ai mis mon fils Christophe dans la classe. Ainsi, si ses copains se moquent de moi, je serai prévenu tout de suite. Un adulte, on sait comment il réagit, mais les enfants, c'est imprévisible!" |
Hélas ! malgré le succès du Pion, Henri Guybet ne devient pas une star de première grandeur et retourne à la galère des seconds rôles dans des comédies parfois plutôt bonnes (Le Guignolo, Est-ce bien raisonnable, Pétrole Pétrole, Pourquoi pas nous), mais le plus souvent assez médiocres ou même carrément mauvaises (Le Bahut va craquer, Les Diplômés du dernier rang, On n'est pas sorti de l'auberge). "C'est d'accord, admet-il en 1981. Je n'ai pas toujours travaillé sur des sujets fantastiques. Mais [...] tant que l'on aura pas saisi à quel point le rire pouvait être corrosif (tenez, Aristophane, chez les Grecs! voilà quelqu'un qui savait tirer parti du comique), je ne vois pas pourquoi je me priverais de travailler, n'est-ce pas?" |
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En 1981, sa vieille copine du Café de la Gare, Sotha, lui donne l'un des trois premiers rôles dans sa comédie dramatique Les Matous sont romantiques. Le film sera un échec critique et financier, et sombrera rapidement dans l'oubli. "Les amis, c'est une denrée rare, il faut les garder. À l'époque du Café de la Gare, j'aurais pu changer d'agent comme les autres. On me l'a proposé. Mais j'ai refusé. Et je ne l'ai jamais regretté." (1981) |
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À partir de 1984, la "franchouille" est à l'agonie et il délaisse le cinéma en faveur du théâtre et de la télévision. Il tient des premiers rôles dans plusieurs téléfilms et mini-séries. Il est aussi la vedette d'une sitcom qui sera diffusée pendant deux ans : Douce France (1989-1991).Vers le milieu des années 1980, il a enregistré deux chansons comiques: T'as ta tête où et Le voisin de gauche. La première, que l'on peut entendre sur le site de Bide et Musique, est une petite ritournelle sympathique et sans autre ambition que de faire sourire l'auditeur. Et puis, même s'il n'est pas un second Caruso, Henri Guybet a tout de même un filet de voix agréable et peut pousser la chansonnette avec beaucoup d'entrain.Au début des années 1990, il a été la vedette de quatre pièces de Marc Camoletti : La Bonne Anna, Bisous Bisous, Darling Chérie, Pyjama pour six. Elles sont toutes disponibles sur vidéocassette, en format SECAM, et passent régulièrement à la télévision.De 1993 à 1995, il a été l'une des vedettes de Une cloche en or aux côtés de Sim. Ce grand succès populaire a été tourné pour la télévision et est maintenant disponible sur DVD. |
Depuis quelques années maintenant, monsieur Guybet fait des tournées avec une pièce différente à tous les un ou deux ans. Après Le Voyageur de l'an 2000 et Drôle de manoir, il "tourne" présentement avec Monnaie de singes, une comédie très appréciée du public et de la critique. Résumé trouvé sur le Web : "Un cambrioleur terrassé par une crise cardiaque dans le bar du Zoo est à l’origine d’un méli-mélodrame où se croisent une patronne de bar mythomane, un grand singe Bonobo, une ravissante gendarmette spécialisée dans la neutralisation des grands fauves, un policier quelque peu imbibé… De quoi fournir à la troupe de Henri Guybet tous les ingrédients d’une comédie digne des Marx Brothers…" Pour connaître les dates et réserver des places, vous pouvez visiter le site de la fnac. Il y a environ trois ans, Henri Guybet s'est remis à l'écriture : en collaboration avec Éric Lenormand, il a concocté Le Voyageur de l'an 2001 et Drôle de Manoir. Trente ans plus tôt, il avait signé des sketches et des pièces pour Le Café de la Gare. "Pour enfin dire ce que l'on veut et aussi parce qu'être son propre chef, c'est plutôt agréable", confiait-il au Républicain Lorrain en décembre 2001. Et d'ajouter : "Je ne suis pas Bertolt Brecht. Les gens ont besoin de rire et rien ne me fait plus plaisir que de les voir heureux. Et on peut dire beaucoup de choses par la dérision, car l'humour, c'est le fusil de l'homme honnête. " |
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Il fait du doublage et a prêté sa voix à des personnages de A Bug's Life, Toy Story et Chicken Run : dans ce dernier film, il donne beaucoup de truculence à Mr Tweedy, une brute aussi veule qu'épaisse : "Tu rentres une poulette, et puis tu sors une tourte de l'autre côté... Euh, une tourte au poulet, attention hein, pas aux pommes, hein, au poulet !" Plus récemment, on l'a entendu dans la version française de Monsters, Inc. Henri Guybet a côtoyé beaucoup d'acteurs remarquables au cours de sa carrière: "Avec ces gens exceptionnels, j'ai beaucoup appris. J'ai appris surtout à être heureux en scène ou devant une caméra, avec la démesure et la folie nécessaires. [Michel] Serrault me disait: "Sois heureux d'abord, tu seras sérieux ensuite." Et je constate que c'est vrai tout le temps, chez moi auprès de Viviane, ma femme, dans la rue, au boulot, partout… "Au boulot surtout: si tu as de la joie à faire ce que tu fais, même un rôle triste, c'est gagné! Le plaisir de jouer, c'est quand on s'aperçoit qu'on joue l'un pour l'autre. C'est un échange très fort qui ne prend pas à tous les coups. Parfois, ça ne fonctionne pas, on se donne la réplique et au revoir. Mais, quand la magie se met en marche, comme c'était le cas avec Louis de Funès, on fait le plus beau métier du monde." (Ici Paris, août 1999) Cet homme généreux, qui a conservé intact au fil des années la passion de son métier, a donné, en 2001-2002, des cours de théâtre dans un village de l'Essonne. |
Son fils, Christophe Guybet, est aussi comédien et humoriste. On l'a vu notamment dans Le Pion, Le Bahut va craquer, Paparazzi et Les Acteurs. "C'est génial d'avoir un fils qui fait ton métier, car tu te dis qu'il ne t'a pas pris pour un con quand il était jeune. Ça crée des complicités, il me demande mon avis. Quand il a voulu faire ça et qu'il était encore tout môme, je lui ai dit: "O.K.! mais tu vas faire tes armes tout seul, te débrouiller comme je l'ai fait, car je te ferais un grand mal si je te pistonnais." Alors je suis heureux pour lui..." Un regret: "Lui et moi, on n'a encore jamais eu l'opportunité de jouer ensemble... [...] J'aimerais bien qu'on me propose un jour un rôle avec mon fils! Vraiment!" (Ici Paris, août 1999) Son épouse, Viviane Guybet, est une artiste renommée (sculpture et dessin). |
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En décembre 2001, Henri Guybet répondait ceci à un journaliste qui lui demandait de lui parler de ses projets : "Dans la vie, on ne va pas en s'améliorant. Comme les boxeurs, il ne faut pas faire le film ou la pièce de trop, à l'image de ces acteurs qui s'accrochent, et savoir s'arrêter. La comédie est une thérapie qui rend modeste. Comment aspirer à redevenir les personnages que notre âge ne nous permet plus d'être! Soyons aussi sans illusion sur notre célébrité future. Le temps est redoutable. Dans cent ans qui pensera encore à nous? Voyez dans les rétrospectives du cinéma, tous ces noms oubliés... Je pense écrire de plus en plus. Si on me le demandait, dans une autre vie, je choisirai d'être écrivain." |
Avec Pierre Mondy et Jean Lefebvre en octobre
2002
Sources en ligne:
Le Républicain Lorrain
L'Express
L'Alsace
Théâtre
Online
Dewaere Online
Au théâtre ce soir
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Base
La BiFi
©
Cinéphilia, 2000-2004.Dernière mise à jour : le 3 octobre 2004.
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